Le 1er février, un coup d'état militaire éclatait au Myanmar, l'ex-Birmanie. Une répression particulièrement sanglante de la part des forces armées et policières (déjà 600 morts) s'en est suivie. Depuis, la résistance des citoyens n'en finit pas dans ce pays bouleversé. Et notamment, celle des citoyennes. Comme le rappelle ce reportage de RFI, plusieurs groupes de féministes birmanes organisent depuis des semaines la résistance. Mais pas n'importe laquelle : la "révolution du htamein".
Le htamein, c'est le nom du pagne traditionnel porté en Birmanie. Des vêtements féminins que les manifestantes ont décidé d'étendre sur des cordes à linge ou des fils électriques. L'idée ? Eriger en hauteur ces larges bouts de tissu afin d'éloigner les militaires et policiers. Pourquoi donc ? Car, tel que le rapporte Le Monde, marcher sous des vêtements féminins quand l'on est un homme serait un "signe de mauvais augure" dans la société birmane. Et plus que cela, une menace directe pour la virilité et le pouvoir masculin.
Une forme de superstition typiquement sexiste s'il en est. Raison de plus alors pour sortir les htameins du placard. Les manifestantes féministes voient là une forme de désobéissance civile puissante. Pas seulement contre les militaires : également contre le patriarcat et sa bêtise millénaire. Un mouvement subversif.
"La plupart des hommes birmans pensent qu'ils sont supérieurs aux femmes, et que s'ils touchent un sous-vêtement féminin ou n'importe quel vêtement porté en-dessous de la taille par une femme, ils perdront ce pouvoir masculin invisible", décrypte auprès de RFI la militante birmane Hseng Noung. Avant de poursuivre non sans amusement : "Les Birmans testent désormais différentes façons de manifester pour éviter le bain de sang et ça marche bien : beaucoup de militaires n'osent pas passer sous ces cordes à linge". Une technique efficace et qui témoigne de la haute teneur patriarcale du pays.
"L'armée birmane est un club exclusivement masculin depuis toujours. Le gouvernement aussi, la politique, tout ça... Ce sont des affaires d'hommes en Birmanie", déplore encore à ce titre la chercheuse et activiste Karen May Oo Mutraw. Mais au sein de la résistance, la présence est fortement féminine. Et applaudie. Par les manifestants masculins notamment, qui n'hésitent pas à publier des selfies en arborant eux-mêmes le htamein, comme l'observe France 24.
Des salutations qui ne doivent pas nous faire oublier la situation plus qu'alarmante des citoyens et citoyennes birmanes à l'heure actuelle. Par-delà les morts, il faut également avoir à l'esprit le nombre incertain de manifestants faits prisonniers par les militaires, et la répression par la torture et le viol. Mais pour Naw Hser Hser, secrétaire générale de la Ligue des femmes de Birmanie (WLB), l'usage de ce vêtement traditionnel est déjà une forme de victoire symbolique. A Vice, elle explique : "Nous utilisons nos htameins pour montrer que les femmes combattent dans cette révolution en utilisant tout ce qu'elles possèdent". Inspirant.