"Elijo tu apellido" ("Je choisis ton nom"). Ainsi s'intitule la loi votée par Sebastián Piñera, président de la République du Chili, ce 9 mai. Comme le titre le suggère, cette mesure donne "le choix" aux parents. Mais quel choix précisément ? Celui de donner priorité ou non, au nom de famille de la mère pour les enfants.
Dans les pays hispanophones, une personne porte officiellement deux noms : celui du père et celui de sa mère. D'ordinaire et depuis des siècles, c'est le nom paternel qui domine, chez les fils comme chez les filles. La nouvelle loi chilienne compte donc bousculer l'ordre établi des noms, et corriger cette prédominance un brin archaïque. Dans l'espoir d'une société plus égalitaire ? C'est tout du moins ce que semble défendre le président. Cela semble être un détail et pourtant, rien d'anodin à revisiter cet adage selon lequel le masculin l'emporterait forcément sur le féminin.
"La loi 'Elijo tu apellido' contribue au changement culturel que nous prônons en matière d'égalité entre les sexes", développe à ce titre Mónica Zalaquett, la ministre des Femmes et de la Parité du pays, comme le rapporte Courrier International. Une nouvelle qui a forcément fait réagir sur les réseaux sociaux.
"A l'école, j'écrivais toujours le nom de famille de ma mère en premier. Mon père, enseignant et 'politicien', lorsqu'il s'est séparé de ma mère, a oublié qu'il avait des enfants. Si je pouvais légalement échanger son nom contre celui de ma mère, je le ferais sans hésitation", témoigne un internaute espagnol. Un autre abonde : "Depuis que je suis petit j'ai été élevé par mes grands-parents et ma mère, j'ai un énorme lien avec eux, tandis qu'avec la branche paternelle, rien du tout. Et c'est pourquoi je me sens plus représenté par mon matronyme".
"Mes enfants portent le nom de famille de leur père. Mais quand ils ont créé leurs adresses e-mails, ils ont mis leur nom, la première lettre du nom de famille de leur père et mon nom de famille complet. Ca m'a touché en plein coeur", s'exclame encore une mère de famille féministe non sans émotion. Autant de voix citoyennes anonymes qui démontrent que la détermination de l'ordre des noms de famille n'a (vraiment) rien d'anecdotique. Que son sens et son emploi relèvent de l'intime, de l'identité, d'une revendication quasiment politique parfois.
D'où l'utilité d'une loi comme "Elijo tu apellido". Quand bien même certains détails restent à préciser. Ainsi le patronyme, c'est-à-dire le nom du père, reste prioritaire sur le matronyme, nom de la mère, s'il y a un désaccord entre les parents devant la justice. L'enfant devra dès lors attendre ses 18 ans pour changer cet ordre.