"Je ne sais pas comment et pourquoi de telles choses se produisent. Quelle rage !". En juin dernier, deux vidéos édifiantes sont venues mettre en lumière sur les réseaux sociaux un fléau malheureusement bien trop ordinaire : les violences faites aux femmes, et notamment les violences conjugales. Sur l'une d'elles, abondamment relayée, on voit un homme tirer sa conjointe par les cheveux et la frapper à plusieurs reprises. Les faits se seraient déroulés dans le département de Santander, au nord de la Colombie.
D'autres images nous dévoilent le désarroi d'une femme elle aussi victime des abus de son compagnon, se débattant dans ses bras. Cette fois-ci, nous sommes dans la municipalité de Pueblo Bello, en Colombie, toujours. L'internaute anonyme qui a décidé de partager cette vidéo en interpellant directement les autorités locales l'a fait en mettant en exergue un hashtag des plus éloquents : #NoMasFeminicidios (Plus jamais de féminicides). Un cri de révolte qui reflète une réalité que le confinement n'a fait qu'exacerber.
Car en Colombie, "la violence s'est apparemment aggravée durant le confinement", déplore le quotidien espagnol El País. Violences au sein du couple, de la famille, mais aussi "pandémie fantôme" (pour reprendre les termes de l'ONU), celle des femmes assassinées... Des violences par ailleurs systématiques tout au long de l'année. Comme nous le rappelle encore Courrier International, deux femmes meurent chaque jour sous les coups de leur conjoint en Colombie. Depuis le mois de janvier, on dénombrerait pas moins de 315 féminicides. C'est considérable.
La vice-présidente colombienne Marta Lucía Ramírez s'est intéressée à l'usage récurrent des numéros d'urgence ces derniers mois (le confinement dans le pays a été décrété le 25 mars et prolongé jusqu'au 15 juillet) : les appels des victimes de violences auraient augmenté de 150 % durant le confinement. Et par-delà le nombre (vertigineux) de féminicides et d'appels à l'aide, 3 100 femmes auraient été victimes de violences conjugales durant les deux premiers de confinement, souligne le média France 24. Et cela, sans prendre en compte les femmes victimes de violences sexuelles...
"Les chiffres des violences commises contre les femmes sont sous-estimés", alerte par ailleurs Carlos Fernando Galván Becerra, défenseur des droits des femmes au sein de l'Organisation féminine populaire du département de Magdalena. Et le militant d'expliquer pourquoi à France 24 : "Beaucoup de ces femmes ne portent pas plainte contre leurs agresseurs, le confinement rend cette démarche encore plus compliquée que d'habitude. Il est plus compliqué de sortir. Les femmes peuvent théoriquement porter plainte sur Internet ou en appelant un numéro spécial, mais ce n'est pas toujours possible car il n'y a pas Internet sur tout le territoire, sans compter qu'il n'est pas forcément facile de passer un appel si l'on vit sous le même toit que l'agresseur".
Qui dit confinement dit menaces accrues, mais aussi plus de précarité, d'emprise, et de violences psychologiques. Les risques de féminicides sont donc d'autant plus forts. Les citoyens de Colombie en savent quelque chose. En juin dernier, ils ont été bouleversés par la mort tragique de deux jeunes femmes, Daniela Quiñones et Heidy Soriano, assassinées par leurs conjoints. Heidy Soriano a été poignardée par son compagnon, qui a également tué sa fille de quatre ans. Plus que jamais, on a envie de le clamer : #NoMasFeminicidios.