Alors que s'est ouvert à Paris le Forum Génération Egalité, sommet mondial pour discuter d'avancées cooncrètes en faveur des droits des femmes, Emmanuel Macron a accordé une interview au magazine féminin "Elle". Et le président de la République, qui "revendique" son féminisme, en a profité pour glisser son avis sur le port du crop top, ce haut qui dévoile le nombril et a causé des exclusions d'élèves ces derniers temps. Emmanuel Macron tranche : "A l'école, je suis plutôt 'tenue décente exigée', aussi bien pour les filles que pour les garçons. Tout ce qui vous renvoie à une identité, une volonté de choquer ou d'exister n'a pas sa place à l'école. On peut tenir compte de la part de fantaisie d'un ado et tenir bon sur certains principes".
Une déclaration qui a dû enthousiasmer son ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, celui-ci étant également un fervent partisan de la "tenue décente exigée". L'an dernier, en pleine rentrée des classes, Jean-Michel Blanquer évoquait les vertus d'une "tenue républicaine" : "Il est important d'arriver à l'école dans une tenue correcte. L'école n'est pas un lieu comme les autres. Vous n'allez pas à l'école comme vous allez à la plage ou en boîte de nuit. Chacun peut comprendre qu'on vient à l'école habillé d'une façon républicaine", déclarait-il.
Des propos qui avaient fait jaser, aussi bien les militantes féministes que les enseignants. De même, ce sont aujourd'hui les déclarations d'Emmanuel Macron qui indignent sur les réseaux sociaux. L'avocate Julia Courvoisier a notamment réagi : "Le Président se dit 'hostile au crop top', et souhaite que les filles portent des tenues 'décentes'. Ni trop couvertes, ni trop découvertes... Nous devons donc être DÉCENTES. La liberté des femmes est égratignée par tous ces débats qui ne concernent qu'elles".
Des initiatives en forme de mouvements sociaux déployés sur Twitter, aux intitulés ironiques ont immédiatement surgi en réaction à ces propos présidentiels : #BalanceTonTop et #TopIndécent. La journaliste Elsa Gambin explique : "On lance #BalanceTonTop et #TopIndécent pour rappeler qu'on s'habille comme on veut et que personne n'a rien à dire. Bordel. Ni le président ni personne. Balancez vos meilleurs crop top et/ou décolletés !", se réjouit la journaliste.
Mais aussi la professeure Séverine Erhel, qui a posté un selfie accompagné de ce mot d'ordre féministe : "Le corps des femmes, ça reste toujours le problème pour certains donc c'est quoi une tenue indécente ? Je vous laisse avec mon crop top. Bonne journée".
Sur les réseaux, nombreux sont celles et ceux à s'interroger sur le sens véritable de la "décence" valorisée par Emmanuel Macron. Ainsi, le maire de Grenoble Eric Piolle, candidat à la primaire EELV, rappelle : "Le problème, c'est le regard des hommes, pas le nombril des filles."
"La question de la 'tenue correcte exigée' est très ancienne, la tenue de Jeanne d'Arc posait déjà problème, la capuche est suspecte depuis 1713, les culottes trop grosses des hommes du XVIIe siècle faisaient couler de l'encre, bref, c'est pas nouveau", soulignait la journaliste Sophie Fontanel en réaction aux propos de Jean-Michel Blanquer l'an passé. C'est dire à quel point la politique d'Emmanuel Macron ne brille vraiment pas par sa modernité. Et nulle vidéo de Mcfly & Carlito ne saurait changer la donne.
Ironiquement, le jargon présidentiel pourrait même entrer en opposition avec les discours de certaines voix du gouvernement. Comme celle de Marlène Schiappa par exemple, qui l'an passé affirmait "soutenir avec sororité & admiration" les étudiantes qui avaient décidé de porter crop top et jupes "pour affirmer leur liberté face aux jugements et actes sexistes".
Seulement aujourd'hui, Marlène Schiappa ne s'est pas encore exprimée au sujet de l'interview d'Emmanuel Macron et ses leçons de "décence". On aimerait bien savoir pourquoi.