Fine, élancée, assurée et engagée, lorsqu'elle défile sur les podiums, Halima Aden fait plus que présenter un vêtement. Née dans un camp de réfugiés au Kenya, cette Américano-Somalienne de 19 ans, avance avec conviction contre les préjugés et défend la place des femmes musulmanes dans la société occidentale.
Enveloppée dans son hijab, elle couvre ses cheveux depuis l'âge de 8 ans, ses bras jusqu'aux poignets et ses jambes jusqu'aux chevilles, tout en défilant pour Kanye West, Max Mara et Alberta Ferratti. Ces derniers mois, Halima Aden a également fait la Une des magazines Allure et de Vogue Arabia. Au début, "ce n'était pas religieux", a-t-elle expliqué dans un entretien accordé au Monde. "Plutôt comme les fillettes qui se mettent du rouge à lèvres pour faire comme leur mère".
Cet incroyable succès a débuté lorsque la jeune femme s'est présentée au concours de Miss Minnesota USA en novembre 2016. Surprise d'être admise dans la compétition alors qu'elle avait envoyé un portrait d'elle portant le hijab, Halima Aden a fait un passage très remarqué en défilant en burkini. "Quand j'ai entendu parler du concours, j'ai voulu inspirer les femmes musulmanes à relever le défi. Mais je ne voulais pas compromettre mes valeurs", explique-t-elle au site Today. Arrivée jusqu'en demi-finale, Halima Aden se fait alors repérer par l'agence de mannequinat IMG Models, de Gisele Bündchen, Kate Moss et Gigi Hadid.
Pudique et humble, Halima Aden est aux antipodes du monde clinquant de la mode et éveille la curiosité par son authenticité. En s'affirmant telle qu'elle est, la jeune femme offre de nouvelles perspectives aux femmes musulmanes et casse les codes du mannequinat traditionnel. Car si la nudité est considérée comme une preuve de sincérité par certains top-models, défiler couverte de la tête aux pieds pousse le public à percevoir la féminité autrement qu'à travers le galbe d'une hanche. "Le fait qu'Halima ait une histoire personnelle marquante compte beaucoup. A l'ère des réseaux sociaux, la personnalité est devenue le mot-clé", a déclaré à la BBC Michelle Lee, rédactrice en chef d'Allure.
Arrivée aux Etats-Unis à l'âge de 7 ans avec sa mère enceinte et sa grande soeur, Halima Aden a d'abord trouvé refuge dans un centre d'hébergement de St. Louis. "Le centre ressemblait beaucoup à celui du Kenya : il y avait de la criminalité, je ne comprenais rien à l'école, je me sentais sourde et muette", confie-t-elle au Monde.
Puis la famille s'installe dans le Minnesota. Halima apprend l'anglais à l'école et suit un enseignement religieux le week-end. Au lycée, les discriminations et le racisme la révulsent. "J'avais des amies musulmanes qui voulaient faire du sport, mais elles ne pouvaient pas car les filles devaient porter un short. C'est à ce moment que j'ai décidé de participer au concours de Miss Minnesota USA".
Depuis, elle s'inscrit comme un symbole pour les minorités et fait barrage aux préjugés. "Evidemment, nous avons besoin de musulmanes qui réussissent à l'université, qui occupent des postes à responsabilité dans les entreprises. Mais il faut aussi que l'on soit représentée (...). Or les jeunes filles ne 'googlisent' pas les grands patrons, mais elles connaissent les mannequins".