Et si demain les femmes étaient incapables d'accoucher sans médicaments ni médecins ? C'est la crainte de Michel Odent, un obstétricien français célèbre dans le monde pour ses nombreux ouvrages et ses prises de position en faveur de l'accouchement naturel.
A l'occasion de la sortie de son nouveau livre en anglais baptisé Avons-nous besoin des sages-femmes ?, la presse anglaise se fait l'écho des inquiétudes de ses inquiétudes. Il fustige notamment dans cet ouvrage la surmédicalisation de l'accouchement dans les sociétés modernes et s'attaque à la généralisation des péridurales et des césariennes.
D'après Michel Odent, plus d'un quart des naissances en Angleterre se font par césarienne, avec des chiffres qui ont doublé depuis 1990. Cette hausse importante serait due aux médecins, plus prompts à intervenir qu'avant en cas de travail trop lent, mais aussi aux femmes, de plus en plus effrayées à l'idée d'accoucher sans aucune aide médicale.
Il rapporte également que la durée de l'accouchement a augmenté de deux heures et demie entre 2002 et 2008 par comparaison avec les chiffres de 1959 et de 1966. Pour lui, c'est allongement de la durée du travail s'explique par le fait que les femmes se reposent de plus en plus sur les interventions médicales, comme l'utilisation des forceps ainsi que la péridurale.
Michel Odent pointe également du doigt le danger que représente selon lui l'augmentation des accouchements déclenchés par injection d'ocytocine de synthèse. En effet, selon le spécialiste français, le fait d'injecter aux parturientes cette hormone, qu'elles sécrètent naturellement lors de l'accouchement et après, a pour effet de les empêcher d'en produire elles-même à terme.
Or l'ocytocine joue un rôle crucial dans le développement du lien entre la mère et l'enfant après la naissance et permet également la production de lait. "Je pense que le processus humain de production d'ocytocine, également appelée 'hormone de l'amour' et essentielle à la naissance et à la relation parent-enfant, même à l'âge adulte, est en train de diminuer", constate Michel Odent.
Pour le spécialiste, il est indispensable, pour éviter ces dérives, de redonner aux sages-femmes leur rôle essentiel pendant l'accouchement en leur rendant leur place au centre de la salle de travail. Une revendication que ces dernières, qui luttent pour que leur travail soit mieux reconnu depuis des années, n'ont par ailleurs eu de cesse de répéter.