David Cameron l'avait annoncé en juillet dernier, c'est désormais acté. Dès 2018, les entreprises britanniques de plus de 250 employés devront rendre publiques les différences de salaire de leur personnel.
Portée par la ministre des Femmes et des Égalités Nicky Morgan, la mesure a été adoptée vendredi 12 février par le gouvernement britannique. Elle concernera quelques 8 000 sociétés britanniques qui avaient pour le moment choisi de garder secrètes les rémunérations de leurs salariés. Jusqu'ici facultative, la transparence des salaires n'avait été adoptée que par cinq entreprises : Tesco, Friends Life, PwC, AstraZeneca et Genesis.
"Ces dernières années, nous avons vu de bons employeurs faire des progrès pour réduire les inégalités entre les sexes", s'est réjouie Nicy Morgan. "Mais la tâche ne sera pas finie tant que nous ne verrons pas les talents des femmes et des hommes reconnus également et équitablement dans chaque lieu de travail [...] Voilà pourquoi je vous annonce une série de mesures pour soutenir les femmes dans leur carrière, de la salle de classe à la salle de réunion, et ne laisser aucun endroit où l'inégalité des sexes peuvent se cacher. Dans le même temps, je fais appel aux femmes en Grande-Bretagne pour qu'elles utilisent leur position afin que les employés et les consommateurs exigent leur implication dans les entreprises, s'assurent que leurs talents reçoivent la reconnaissance et la récompense qu'ils méritent."
Pour Frances O'Grady, secrétaire générale du Trade Union Congress, cette volonté de transparence salariale impulsée par le gouvernement est incontestablement "un pas dans la bonne direction" même si elle reconnaît que cette mesure ne peut suffire à elle seule pour lutter contre les inégalités de sexe dans le monde professionnel. "Nous sommes déçus que les entreprises ne soient pas tenues de publier leurs chiffres sur l'écart salarial entre les sexes avant 2018. Il n'y a pas besoin d'un tel délai", explique-t-elle dans The Guardian . "Et c'est vraiment dommage que les patrons ne soient pas prédisposés à expliquer pourquoi les écarts de rémunération existent dans leurs lieux de travail et quelles mesures ils comptent prendre pour les réduire."
Sitôt adoptée, la mesure s'est vue adressée un certain nombre de critiques de la part des organisations patronales. Pour Carolyn Fairbairn, directrice générale de la Confederation of British Industry (CBI), cette mesure risque, sous couvert de transparence, d'être "utilisée pour nommer et blâmer les entreprises, car les données ne seront pas en en mesure de présenter une image partielle, en particulier en ne tenant pas compte des différences entre temps partiel et temps plein, et des différences sectorielles."
Déjà en juillet, lorsque David Cameron avait annoncé vouloir s'attaquer aux écarts de rémunération entre femmes et hommes, la presse du centre et de la gauche avait déploré l'absence de mesures concrètes et avancé qu'il s'agissait d'un "écran de fumé". "Le gouvernement devrait communiquer ouvertement ce qu'il advient des informations publiées, faute de quoi les entreprises risquent de se sentir blanchies, et non tenues de combattre les inégalités [...] Si la publication n'est pas accompagnée de mesures actives, la mesure perd tout son sens", analysait ainsi The Independent.
Avec 19,7% d'écart, la Grande-Bretagne se classe au huitième rang européen des plus fortes inégalités de salaires entre les sexes, derrière l'Allemagne ou la République Tchèque mais devant la France, qui truste la 17e place. Selon les chiffres publiés le 5 mars 2015, par l'office européen de statistiques Eurostat, l'écart de salaire entre les hommes et les femmes s'élevait à 16,4 % en 2013 dans l'Union européenne.