A Rabat, la capitale du Maroc, le nom des rues est presque exclusivement emprunté à des hommes. Et si les femmes influentes ne manquent pas, elles ne possèdent cependant pas la même visibilité que leurs homologues masculins, "ce qui est un des symboles de la domination masculine", comme l'explique le M.A.L.I (Mouvement alternatif pour les libertés individuelles).
Ce dernier a donc voulu mener une "initiative pour l'égalité" en changeant l'appellation des artères de la ville par le patronyme de femmes illustres, et ainsi "redonner une place aux femmes qui sont exclues de l'espace public et confinées dans l'espace domestique", comme l'explique Betty Lachgar, militante du collectif, à l'AFP.
Le M.A.L.I est né en 2009. Son nom en darija, le dialecte local, signifie d'ailleurs "Qu'ai-je de différent". Sur leur page Medium, on peut lire que le groupe est né de la nécessité de défendre les libertés individuelles des Marocain·es :"Abus de pouvoir, inquisition socio-religieuse, textes de loi abusifs, étouffent nos libertés fondamentales. D'où l'importance d'un Mouvement Alternatif pour les Libertés Individuelles".
Le collectif se bat ainsi pour la liberté personnelle, de conscience, d'opinion, mais aussi les droits reproductifs et les droits des femmes : "Le droit à l'héritage, la lutte contre les violences faites aux femmes et de le harcèlement sexuel sous toutes ses formes ainsi que le sanctionnement des discriminations genrées." Il ajoute également que "La liberté au Maroc est loin d'être un acquis, sa préservation ou sa reconquête est un combat à mener au quotidien."
Durant l'action, les militant·es ont ainsi remplacé l'avenue Patrice Lumumba, homme d'Etat congolais, par le nom de Touria Chaoui, la première aviatrice civile du monde arabe, marocaine, assassinée à 19 ans devant chez elle. La rue Moulay Idriss (du nom du fondateur du royaume idrisside) a quant à elle été rebaptisée rue Kenza al-Awrabya, l'une des reines de la même dynastie du VIIIe siècle.
Une opération essentielle qui rappelle celle du collectif Nous Toutes en France, qui avait entrepris la même chose à Paris, en remplaçant 1400 noms de rues dans la nuit du 7 au 8 mars, à l'occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Pour le Mali, il était cependant important de ne pas agir ce jour-là car "il ne suffit pas d'une seule journée pour lutter pour les droits des femmes", comme l'indique Jeune Afrique.