C'est, de l'aveu même d'un élu de la majorité, une loi qui aura « valeur de test ». Ce mercredi 10 décembre, le ministre de l'Économie présente la loi Macron en Conseil des ministres, avant qu'elle ne soit examinée par les députés à partir du 22 janvier 2015. Parmi les mesures-phares, visant à relancer la croissance dans divers secteurs de l'économie française, une en particulier semble provoquer des points de frictions : l'assouplissement de la réglementation encadrant le travail le dimanche.
Actuellement, l'article L. 3132-3 du Code du travail précise que « dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche ». Pourtant, les exceptions à ce principe du repos dominical sont nombreuses.
Une dérogation autorise ainsi les commerces de détail non-alimentaire à faire travailler leurs salariés dans la limite de 5 dimanches par an, sur autorisation préalable du maire ou du préfet de police. En contrepartie, les salariés travaillant le dimanche doivent obligatoirement être rémunérés le double de leur salaire habituel, et bénéficier d'un repos compensateur équivalent en temps.
Autre dérogation : celle qui concerne les commerces implantés dans des « périmètres d'usage de consommation exceptionnel » (en clair, les zones à forte activité commerciale) à Paris, Lyon, Marseille et Lille. Là encore, les salariés sont payés double et ont droit à un repos compensateur.
La loi Macron prévoit d'abord que les commerces non-alimentaires souhaitant ouvrir le dimanche puissent le faire sans demander l'autorisation au maire ou au préfet de police. Surtout, Emmanuel Macron prévoit d'augmenter le nombre d'ouvertures possibles de 5 à 12 par an, hors zones touristiques et hors alimentaires. Le maire devra en revanche cette fois-ci donner son accord.
Enfin, la loi souhaite que les magasins situés dans des « zones à fort potentiel touristique et économique » puissent rester ouverts tous les dimanches et en soirée, après 21 heures. Cette disposition pourrait ainsi concerner les grands magasins des Champs-Élysées ou du boulevard Haussmann, à Paris, ainsi que ceux se trouvant dans les gares et les aéroports.
Le projet de loi présenté par Emmanuel Macron prévoit des compensations pour les salariés qui acceptent de travailler le soir ou le dimanche, le travail dominical ayant lieu sur la base du volontariat.
« Dans tous les cas, en particulier pour les entreprises de plus de 11 salariés, l'ouverture dominicale devra faire l'objet d'un accord majoritaire des salariés, et l'objet d'une compensation, salariale et de repos », affirme Emmanuel Macron sur le site du gouvernement dédié à la proposition de loi. Pour les entreprises de plus de 20 salariés, le montant des compensations devrait être renvoyé à des accords de branche ou d'entreprise.
En revanche, pas de précision pour le moment pour les entreprises comptant moins de 20 salariés. Seront-elles exemptées de compensations salariales ? « Le projet de loi définit des modalités de compensation, sachant que toutes les entreprises ne seront pas en mesure de doubler le salaire le dimanche », prévient simplement le gouvernement.
Il faut simplifier le travail le dimanche et en soirée à trois conditions : volontariat, accord majoritaire et compensation de salaire.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 15 Octobre 2014
Présenté par le ministre de l'Économie comme un moyen « de lever les rigidités, de lever les blocages, les plafonds de verre, de permettre à notre économie de mieux fonctionner, de mieux circuler », le projet de loi sur le travail le dimanche est loin de faire l'unanimité auprès des élus de la majorité et des syndicats. Considéré comme « fourre-tout », il est sévèrement critiqué sur le fond par les socialistes qui, à l'instar de la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann, considèrent qu'il s'agit d'une « remise en cause de tous les combats historiques de la gauche ».
Pour le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis, le texte dans l'état n'avantage pas suffisamment les salariés. « Il faut sur ces questions qu'il y ait des compensations qui n'étaient pas dans le texte au point de départ », a-t-il déclaré.
Des réserves également faites par le Conseil d'État qui a estimé ce mercredi matin que la loi suscitait « des interrogations au regard du principe d'égalité », notamment en déléguant aux accords de branche la fixation du montant des compensations salariales. Pour le Conseil d'État, verser ces compensations dans les petites entreprises pourrait conduire au « résultat inverse de l'objectif recherché » et décourager le travail dominical.
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