Une sur cinq. C'est le nombre de femmes immigrées d'Afrique subsaharienne qui déclarent avoir subi des violences sexuelles au cours de leur vie. Un chiffre considérable. Et ce n'est pas la seule révélation édifiante mise en évidence par ce récent rapport de l'Institut national d'études démographiques (Ined).
Prenant en compte les nombreuses données récoltées auprès de 74 établissements de santé en Île-de-France, cette enquête étoffée de Julie Pannetier, Andrainolo Ravalihasy et Annabel Desgrées du Loû en dit également long sur les conditions de vie alarmantes desdites femmes exilées. Notamment lorsque l'on s'attarde sur la santé des principales concernées : parmi les statistiques, on observe ainsi qu'un grand nombre de femmes ont été infectées par le VIH en France.
Pour la chercheuse Julie Pannetier, cela ne fait d'ailleurs aucun doute : "Ces violences sexuelles sont liées aux conditions de vie en France, et il y a une corrélation statistique entre celles-ci et l'infection par le VIH", détaille la maîtresse de conférence dans les pages du Monde. Un constat accablant.
Plus précisément, ce rapport révèle qu'un tiers des femmes séropositives prises en compte auprès de ces 74 établissements de santé parisiens auraient été infectées par le VIH après leur migration. Et les principales concernées auraient également été 4 fois plus souvent victimes de viols durant cette période que les femmes non infectées. Comment l'expliquer ? Par une situation globale "d'insécurité résidentielle et administrative", rétorquent les chercheuses. En somme, la précarité de ces femmes ne fait qu'exacerber le risque de violences sexuelles.
C'est d'ailleurs ce qu'explique l'étude : "Le fait de changer souvent d'hébergement au cours d'une même année, avec des nuits passées alternativement en hébergement d'urgence, chez des connaissances et/ou dans la rue, est associé à une probabilité plus élevée de subir des violences sexuelles". Des risques d'autant plus considérables quand l'on sait que parmi les sondées, une femme sur cinq explique ne pas avoir d'hébergement fixe ou être en situation irrégulière. Et même l'avoir été, parfois, durant une année entière.
Les soucis majeurs de logement, mais aussi l'accès inégal aux ressources, aux titres de séjour et à la nourriture, pour ne citer que cela, sont des formes de violences sociales et économiques indissociables des violences faites aux corps des femmes et à leur santé. C'est pour cela que la lutte pour les droits des femmes n'est pas le fait d'une seule cause ou d'une seule indignation - elle révèle bien des discriminations et des inégalités.
Et c'est aussi pour cela qu'aujourd'hui, les auteurs du rapport de l'Ined en appellent à un droit des femmes immigrées "à vivre sans violence". Un idéal qui témoigne d'une véritable urgence sociale, et qu'on ne peut que défendre.