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Je démissionne demain : les bonnes raisons de le faire (enfin)
Publié le 26 octobre 2020 à 18:48
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Trop c'en est trop : cette semaine, c'est décidé, je claque la porte de mon taf. Loin d'être un point final, une démission peut faire office de nouveau départ. Le blogueur Valentin Brunella l'explique dans un livre très punchy. Et détaille mille bonnes raisons de sauter le pas.
Demain, je démissionne ! Demain, je démissionne !© Adobe Stock
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Et si redonner du sens à sa vie pro passait par une fracassante démission ? Mais dans ce cas-là, que faut-il au juste garder à l'esprit quand l'envie de mettre les voiles nous titille ? L'ingénieur et blogueur Valentin Brunella éclaire notre lanterne dans un petit livre à la fois manifeste et guide : La semaine prochaine je démissionne.

Ne vous laissez pas berner par son titre, ce "mode d'emploi pour imaginer le nouveau chapitre de sa vie" - dixit l'accroche - n'a rien d'un bête manuel de développement personnel vous incitant à ouvrir vos chakras. La singularité du ton de Valentin Brunella réside dans un équilibre entre prescriptions et observations cinglantes. L'auteur ne se prive pas de tacler la novlangue du milieu entreprenariat, "l'enfer" des open space mais aussi le stéréotype de "l'employé Linkedin" - inspirant, motivé, philosophe. Un employé qui... n'existe pas.

Limpide, La semaine prochaine, je démissionne nous donne mille et une bonnes raisons de reprendre votre vie en mains en cas de désillusion pro. Celles et ceux qui hésitent à quitter leur job pour de nouvelles aventures auront désormais bien des raisons de méditer la chose. Non, quitter son taf n'a rien d'une folie à l'heure de la start-up nation. Valentin Brunella nous explique pourquoi penser ce grand départ importe. En six points.

Pour concrétiser ses aspirations

"C'est enivrant de prendre conscience qu'il existe autant de choses que j'ai envie de faire et qui feraient sens pour moi", s'enthousiasme d'emblée l'auteur. Les aspirations, c'est ce qui vous inspire par-delà les murs de votre emploi actuel, comme une bouffée d'air frais revigorante au sein d'un environnement trop étouffant. Cela peut être une activité sportive, du bricolage, des écritures, du dessin, de la couture, de la cuisine... Vous avez l'idée.

Pour l'auteur, l'on peut tout à fait changer de boulot si notre emploi n'est pas compatible avec nos aspirations : si elles ne peuvent pas s'imbriquer dans notre planning, exigent trop d'efforts ou de moyens, un temps trop conséquent, une régularité intenable. "Changer de métier est une décision difficile mais qui fera sens", écrit-il. Surtout si s'impliquer dans ses aspirations nécessite un stage ou une quelconque formation professionnelle.

Alors, qu'est-ce qu'on attend ?

Partir un jour, sans retour. © Adobe Stock
Pour accroître son potentiel de kiffe

C'est quoi le potentiel de kiffe ? Pas juste un barbarisme "djeunz", mais un baromètre judicieux qui vous invite à noter (sur cinq) des niveaux de satisfaction concernant votre vie pro actuelle. Le niveau d'intérêt intellectuel ("mon métier me stimule-t-il intellectuellement ?") et de fierté ("suis-je fière de ce que je fais ?"), d'impact ("ce que je fais a-t-il un impact, est-ce utile ?") et d'autonomie ("suis-je relativement libre ou contraint dans mon taf ?").

Suivant cette logique, Valentin Brunella nous invite à quantifier notre équilibre de vie : la place qu'occupent nos horaires de travail dans la semaine, le temps que l'on conserve pour la famille et les amis, mais aussi pour soi. Le maître-mot ? L'épanouissement. Et cela compte quand on parle de "kiffe". Pas de "potentiel" sans une prise en compte de la charge de travail, de la relation avec la hiérarchie, du niveau de reconnaissance et de stress.

Si tout cela est à zéro, il est donc grand temps de vous alarmer.

Pour chérir son épanouissement

L'épanouissement, justement, prend diverses formes. Il dépend de la qualité du lieu de travail, du confort de son poste, d'une bonne entente avec ses collègues, de la bienveillance qui règne (ou non) au sein des locaux, des cadences, de la pression hiérarchique... Du salaire aussi. Pas juste être payée, mais "être payée à la hauteur de son travail", comme le définit le blogueur et ingénieur. Bref, avoir le sentiment d'être à sa juste place.

Sinon, ça casse. L'épanouissement est un argument-phare quand on parle de démission. Pourquoi ? Car, détaille encore ce très factuel manuel, 36 % des Français·e·s auraient déjà fait un burn out. Et surtout, 3,2 millions d'entre elles et eux auraient avoué se sentir ou s'être senti exposé·e·s "à un risque élevé de burn out". Sans compter celles et ceux qui déclarent s'ennuyer au bureau, ne pas se sentir impliqué·e·s, avouent se forcer à paraître de bonne humeur...

7 bonnes raisons de prendre la poudre d'escampette. © Adobe Stock

Raison de plus pour cogiter. "Définir mon rapport au travail revient en premier lieu à me poser la question de la place que je lui donne et ce à quoi je veux qu'il serve dans ma vie. La définition de mon rapport au travail me sert de boussole pour établir mes choix en général", développe en ce sens l'auteur. Une vraie philosophie.

Pour comprendre que le job de rêve n'existe pas

Oui, mais... Epanouissement ou émancipation ? Valentin Brunella pose la question. La nuance entre les deux ? Se dire que notre travail doit être épanouissant, c'est-à-dire engendrer un plein sentiment d'harmonie (sinon, autant en changer) ou bien qu'il doit nous émanciper, c'est à dire "nous libérer d'une dépendance d'ordre moral ou intellectuel, de préjugés, d'erreurs". Et si penser que le taf se doit d'être épanouissant était une erreur ?

Quand on veut démissionner, c'est une pensée à cajoler, développe l'expert : comprendre que le "job de rêve", c'est-à-dire celui qui procure une impression totale de satisfaction, n'existe pas. Que bonheur et travail peuvent être dissociés. Bonheur, mais pas plaisir : "Je veux prendre du plaisir, mais cesser de me torturer avec l'idée que le travail devrait me rendre heureux. Je travaille pour vivre, je ne vis pas pour travailler", rappelle le spécialiste.

C'est peut être là la clé pour bousculer les lignes, bouleverser sa vie pro en mettant le la sur l'indépendance d'esprit et l'autonomie. Soit la définition de l'émancipation : "se libérer d'une autorité, d'une contraire". Et surtout, dixit l'auteur, "des contraires que je n'ai pas choisies, des choix qui ne sont pas les miens". Redevenir libre !

Pour enfin assumer son "pouvoir-faire"

Le choix, c'est crucial quand on parle de santé professionnelle. Se dire : tu as le choix. Par-delà ses notions de potentiel de kiffe et d'équilibre de vie, Valentin Brunella insiste sur un concept, celui de "pouvoir-faire". A l'origine, c'est une notion du penseur autrichien Ivan Illich. Que signifie-t-elle ? Que l'individu porte en lui la capacité de façonner son environnement librement. Qu'il a le pouvoir de revendiquer son indépendance, toujours.

Un ouvrage à la fois pragmatique, philosophique et satirique. © Editions Vuibert

Cette idée-là ressort de La semaine prochaine je démissionne, petit manifeste qui délivre une ode certaine à notre mobilité professionnelle. Pouvoir-faire, c'est pouvoir décider du récit de sa vie pro. Comme passer à l'action quand l'on se ressent brimé·e ou péniblement coincé·e dans sa carrière. Et, pourquoi pas, penser à une reconversion radicale. Dans tous les cas, deux mots doivent équilibrer notre pouvoir-faire : la prudence et la patience.

Et aussi, développe l'auteur, cette idée paradoxale que "trop de choix tue le choix". A garder dans un coin de la tête avant de se jeter dans le grand bain. "Car chaque individu fait désormais face à une quantité extraordinaire de choix. Mais cette abondance est aussi source d'anxiété. Pour faire un choix, il faut être capable de hiérarchiser ses préférences", prescrit en ce sens Valentin Brunella. Savoir classer, c'est déjà les prémisses d'un grand départ.

Pour oser dire "non !"

Démissionner, c'est enfin, et surtout, revendiquer un pouvoir : celui de dire "non". NON ! Pour l'expert, dire non est carrément la "condition d'émancipation number one". Cette possibilité-là n'est pas (qu')un droit, c'est aussi un devoir. Surtout quand l'inverse pourrait nous d'autant plus nous miner physiquement et psychologiquement.

"D'un côté j'en veux à ceux à qui j'ai dit oui, de l'autre je m'en veux de ne pas avoir su dire non. Je pourrais sans doute m'éviter des souffrances inutiles. Après tout, si je disais non, ce serait peut être simplement affirmer que j'existe et dire à haut à voix que j'ai des limites, qui correspondraient à mes capacités physiques et émotionnelles à encaisser le travail", confesse Valentin Brunella. Et si, justement, on réapprenait à vivre ?

La semaine prochaine je démissionne, par Valentin Brunella.
Editions Vuibert, 180 p.

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