26 %. C'est le taux d'abstention observé durant le premier tour de l'élection présidentielle. Le deuxième plus haut niveau d'abstention depuis l'élection présidentielle de 2002, il y a vingt ans. Un chiffre qu'il convient désormais de décomposer, puisqu'il exprime un certain écart entre les générations de votants, mais aussi entre les classes et les genres.
Ainsi, relève Franceinfo, la part d'abstentionnistes serait de 46% chez les 25-34 ans, contre 12% chez les 60-69 ans. Un indéniable écart. Plus encore, on dénombrerait 42% d'abstentionnistes chez les 18-24 ans. Selon les premières analyses, ces chiffres éloquents révéleraient un décalage entre les préoccupations de l'électorat jeune (comme le féminisme, le genre et l'écologie) et les thèmes mis en avant au cours des débats de la campagne.
Une réflexion appuyée par un chiffre : selon l'enquête de l'institut BVA relayée par le journal Ouest France, 29 % des femmes n'ont pas voté en France au premier tour, contre 24 % des hommes.
Ecart de genres donc, mais de classes également : 35 % des ouvriers se seraient abstenu de voter au premier tour, contre 14 % des cadres. C'est encore de ce côté-là que le fossé se creuse.
Tel que l'énonce encore l'enquête d'opinion, cette abstention considérable s'expliquerait notamment par une forme de "désaffection démocratique". Pour 26 % des abstentionnistes, il n'y avait ainsi "pas grand-chose à attendre de cette élection", face aux pronostics réitérés au sein des sondages et médias, et finalement effectifs : soit, comme en 2017, un duel entre Emmanuel Macron (27,6 %) et Marine Le Pen (23,4 %).
Il y aurait donc, souligne le professeur à Sciences Po Bordeaux Vincent Tiberj du côté de Franceinfo, une véritable "désillusion des Français face au vote", phénomène par ailleurs déjà observé à la précédente élection présidentielle. Plus encore, le sondage de l'institut BVA suggère également "un manque de motivation" et "un problème d'offre électorale". Voire même, pour un très léger nombre (7 %) une "peur d'être affecté par le Covid".
Une abstention qui pourrait s'exacerber au second tour ? A Franceinfo, Vincent Tiberj s'interroge, et s'inquiète : "En 2017, l'abstention avait progressé, mais aussi les bulletins blancs ou nuls. Cette année, la légitimité de Marine Le Pen et sa capacité à gouverner pourraient être remises en cause par une abstention encore plus forte au second tour et par un score beaucoup plus étriqué".