Ce dimanche 22 septembre se tenait la 71e cérémonie des Primetime Emmy Awards, qui récompense les meilleures oeuvres télévisuelles américaines diffusées en première partie de soirée (comprenez séries, téléfilms, émissions). Au palmarès, Game of Thrones pour la Meilleure série télévisée dramatique, Fleabag pour la Meilleure série comique, ou encore Chernobyl, le drame qui retrace les faits juste après l'explosion de la centrale ukrainienne, qui a raflé celui de Meilleure mini-série. Des résultats plus ou moins contestés - Game of Thrones n'a pas réellement fait l'unanimité niveau critiques lors de cette ultime saison -, qui ont laissé place à plusieurs discours importants.
L'actrice Michelle Williams n'a ainsi pas manqué de retenir notre attention par le caractère nécessaire de son intervention. Récompensée comme Meilleure actrice dans une série ou un téléfilm pour son interprétation de Gwen Verdon dans Fosse/Verdon (biopic romancé sur Bob Fosse, chorégraphe et réalisateur de Chicago et Cabaret, et Gwen Verdon, actrice et danseuse prodige), elle a saisi l'occasion pour évoquer un sujet essentiel et dramatique : les inégalités salariales et de traitement entre les acteurs et les actrices, mais aussi entre les actrices blanches et racisées.
Après avoir remercié ses producteurs et productrices (FX et FOX) de l'avoir payée équitablement, elle a affirmé voir cela "comme une reconnaissance de ce qui est possible lorsqu'on fait confiance à une femme pour discerner ses propres besoins, qu'elle se sent suffisamment en sécurité pour les exprimer et qu'elle est suffisamment respectée pour être entendue", a-t-elle entamé.
"Quand j'ai demandé mes cours de danse, on m'a répondu 'oui'. Quand j'ai demandé plus de cours de chant, on m'a répondu 'oui'. Une perruque différente, une paire de dents pas en caoutchouc, 'oui'. Toutes ces choses, elles demandent des efforts et coûtent plus cher, mais mes patrons n'ont jamais présumé savoir mieux que moi ce dont j'avais besoin pour faire mon travail et pour honorer Gwen Verdon."
Elle enchaîne ensuite avec une comparaison glaçante et trop souvent ignorée. "La prochaine fois qu'une femme, et surtout une femme de couleur, parce qu'elle gagne 52 cents pour chaque dollar gagné par un homme blanc pour le même poste, vous dira ce dont elle a besoin pour faire son travail, écoutez-la. Croyez-la, parce qu'un jour elle pourrait se tenir devant vous et vous dire 'merci' de lui avoir permis de réussir grâce à son milieu de travail, pas en dépit de celui-ci."
En France, contrairement aux Etats-Unis, aucune statistique ne permet de comparer ces inégalités salariales entre femmes blanches et racisées, et par conséquent entre femmes racisées et hommes. Ce qui, comme le pointaient Les Glorieuses, ne signifie en aucun cas qu'elles n'existent pas.
Patricia Arquette a quant à elle reçu le prix de Meilleure actrice secondaire dans une mini série ou un téléfilm, pour The Act. Sur scène, elle a témoigné de sa douleur face à la perte de sa soeur Alexis Arquette, décédée en 2016, une femme trans également actrice, et en a profité pour adresser un message poignant à l'assemblée : "C'est formidable... Mais je suis tellement triste, j'ai le coeur brisé", confie-t-elle. "J'ai perdu ma soeur Alexis. Les personnes trans continuent d'être persécutées. Je suis en deuil chaque jour de ma vie pour Alexis et je le serai jusqu'à mon dernier jour ou jusqu'à ce qu'on ce que l'on change vraiment les choses et que les personnes trans arrêtent d'être persécutées ainsi. Et donnez-leur du travail ! Ce sont des êtres humains ! Donnons-leur du travail !".
Un appel à davantage de diversité que Rachel Brosnahan, géniale interprète de The Marvelous Mrs. Maisel, partage également. Juste avant la cérémonie, elle a ainsi annoncé être sur le point de se lancer dans la production de séries, qui aurait pour but de faire entendre de "nouvelles voix". "Comme tant d'autres, j'ai été frustrée par le nombre de conversations que nous avons eues au sujet des changements dans notre industrie, et par la lenteur de ces changements", déclare-t-elle au micro de The Hollywood Reporter, sur le tapis rouge. "Ce que j'aimerais faire avec cette plateforme, c'est amplifier et élever de nouvelles voix qui n'ont pas eu la chance d'être entendues".
Espérons que ces changements, au même titre que les revendications dont on fait part Michelle Williams et Patricia Arquette, contribuent à enfin faire bouger les choses - et rapidement.