L'article paru dans le média américain Politico a fait l'effet d'une bombe. Ce lundi 2 mai, le journal américain a publié ce qui serait "l'avant-projet d'une décision majoritaire rédigé par le juge conservateur Samuel Alito et daté du 10 février", décrit l'AFP. Une fuite de documents inédite qui menace dangereusement l'arrêt historique de Roe v. Wade, dans lequel la Cour suprême a reconnu le droit à l'avortement en 1973, et s'aligne tragiquement sur les mesures anti-IVG adoptées au Texas ou en Oklahoma, notamment.
Le magistrat républicain écrit : "Nous estimons que Roe v. Wade doit être annulé". "L'avortement constitue une question morale profonde", estime-t-il encore. "La Constitution n'interdit pas aux citoyens de chaque Etat de réglementer ou d'interdire l'avortement", ajoute-t-il, précisant qu'il "n'est protégé par aucune disposition de la Constitution".
"Il est temps de tenir compte de la Constitution et de rendre la question de l'avortement aux représentants élus par le peuple", continue encore le juge Alito. "Nous ne pouvons faire que notre travail, qui est d'interpréter la loi. La Constitution ne donne pas un droit à l'avortement" Et d'affirmer : "La conclusion inéluctable est que le droit à l'avortement n'est pas profondément enraciné dans l'histoire et les traditions de la nation".
Toujours d'après le document intitulé "Avis de la Cour", les négociations pourraient aller jusqu'au 30 juin.
"Une telle issue ne serait pas une surprise", note le Los Angeles Times. "[Samuel] Alito et le juge Clarence Thomas disent clairement depuis longtemps qu'ils pensent que Roe devrait être annulé. Ces dernières années, ils ont été rejoints par trois juges en accord avec eux et nommés par Trump". Brett Kavanaugh, Amy Coney Barrett qui a remplacé la féministe Ruth Bader Ginsburg, et Neil M. Gorsuch.
Quelles seraient les conséquences si ce projet venait à être voté ? Chaque Etat serait libre d'interdire ou non l'accès à l'avortement. Pour l'instant, "la loi actuelle empêche le gouvernement d'interférer dans le choix d'une femme d'interrompre une grossesse avant 23 semaines", explique CNN.
Les Etats du sud et du centres particulièrement conservateurs et religieux, risqueraient de la bannir sans attendre. Dans le Wisconsin par exemple, "c'est alors une loi du XIXe siècle, interdisant aux médecins de pratiquer un avortement sauf en cas de danger pour la mère, qui redeviendrait la norme", note Courrier International.
Sur Twitter, l'organisation Planned Parenthood condamne une telle perspective tout en essayant de rassurer les concernées. "Soyons clairs : c'est un avant-projet. Il est scandaleux, sans précédent mais pas final : l'avortement reste votre droit et est encore légal".
Sans attendre, lundi 2 mai au soir, de nombreux·ses défenseur·euses de l'IVG se sont rassemblé·es devant le bâtiment de la Cour suprême à Washington pour protester contre cette décision rétrograde et dangereuse. Une assistante parlementaire de 23 ans nommée Abby Korb s'y est rendue pour scander "mon corps, mon choix". Auprès de l'AFP, elle se décrit "littéralement en état de choc". Elle rappelle par ailleurs que "rendre les avortements illégaux ne va pas y mettre fin, cela va juste les rendre plus dangereux".
En effet, les chiffres à ce sujet sont limpides. Le nombre d'avortements ne baisse pas lorsqu'il est rendu illégal. Ce qui change, c'est l'explosion des complications sanitaires et des risques de décès pour celles qui y ont recours dans une clandestinité imposée et forcément périlleuse.
En aucun cas, l'annulation de Roe v. Wade ne protégerait pas la vie. Elle ne ferait que la condamner.