Fadura Famah avait 34 ans quand, à la suite d'une méningite quasi mortelle, elle s'est retrouvée paralysée de la nuque aux talons. A tout ce qu'impliquait ce nouveau quotidien bouleversant, s'ajoutait une réalité esthétique et pratique : les vêtements tels qu'ils sont fabriqués par l'industrie du prêt-à-porter ne sont pas adaptés aux personnes en fauteuil roulant.
"Quand je suis rentrée de l'hôpital, je n'ai rien trouvé à me mettre", se souvient celle qui a toujours adoré la mode auprès de RFI. "Tout a changé, de vos mouvements à votre silhouette - vous ne vous sentez pas bien du tout, vous vous sentez perdu·e. Tout devient un gros obstacle - des voyages à l'incapacité de travailler, en passant par le fait d'être confiné à la maison - et maintenant vous n'avez rien à porter." Elle poursuit : "Je me suis demandé : "Est-ce que c'est moi maintenant ? Vais-je toujours porter des t-shirts et des pantalons d'homme ?".
Dix ans plus tard, la Britannico-somalienne peut se réjouir d'avoir elle-même résolu ce problème, en collaboration avec la styliste Harriet Eccleston. "Sur les pantalons, la ceinture devant est abaissée et facilement accessible, avec des élastiques et de longues fermetures éclair", détaille ainsi cette dernière, pour qui ce genre de collection est une première. "Il y a aussi des plis aux genoux : comme ça, quand vous êtes assis, il tombe élégamment".
Un succès, dont Fadura Famah atteste elle-même. "Vous voyez, aujourd'hui, je trouve que j'assure dans cette robe ! Parce qu'elle a été faite pour moi. Je n'ai pas eu de mal à la mettre et je n'aurai pas de mal à l'enlever." Résultat : des couleurs vives ou pastel, des détails pointus, des coupes intemporelles et tendance.
Et comme une révolution n'arrive jamais seule : la ligne a été présentée à la Fashion Week de Londres le 19 septembre, faisant défiler mannequins valides et en fauteuil. Parmi ces dernières, Heidi, qui confie au média français : "J'espère qu'aujourd'hui on pourra réveiller l'industrie de la mode et qu'elle comprenne qu'il faut faire quelque chose".
"Quelque chose", c'est par exemple ne plus avoir à "choisir entre style et confort", comme l'a toujours fait Faduma Famah. Et ne plus se sentir exclue non plus des campagnes ou des créations des géants du prêt-à-porter. "Je veux que quelqu'un soit regardé et que la personne qui regarde dise : "Oh mon Dieu, elle est si jolie". Votre haut est très beau, votre robe est très belle, votre costume est très beau...", ajoute la co-créatrice.
"Si la collection comporte des modèles en fauteuil roulant et des modèles sans fauteuil roulant, c'est en partie parce que nous essayons de montrer aux autres designers qu'il est possible de concevoir des modèles pour les deux", explique par ailleurs la directrice du show Tiffany Saunders à My London. Il serait temps.