"Je ne cherche pas à ce que les gens ressentent de la pitié, c'est une situation difficile". L'ancien footballeur international Patrice Evra s'est confié au journal britannique Times. Le sportif de 40 ans a témoigné d'un drame relaté dans son autobiographie, I love this game : le viol dont il a été victime durant son adolescence.
A l'âge de 13 ans, l'ancien joueur de Manchester United aurait été violé par le directeur d'un collège dans lequel il étudiait, un homme qui l'aurait hébergé chez lui plusieurs soirs par semaine.
"Croyant que je dormais, il passait ses mains sous ma couette et essayait de me toucher, écrit-il dans son livre, comme le relate L'Equipe. "Je savais que ce qu'il faisait était mal, alors j'essayais de le repousser et de le frapper. J'étais robuste, mais j'avais peur (...). Ça pouvait durer 10 ou 15 minutes, comme une bagarre. Il ne rigolait pas ; il essayait à tout prix de m'enlever mon pantalon. Dans le noir, il ne parlait pas. Mais il se touchait et la situation l'excitait sexuellement. (...) La dernière nuit chez lui, quand il savait que j'allais rentrer chez moi, il a fini par réussir. Il a mis mon pénis dans sa bouche."
"C'était un moment difficile pour moi et je ne l'ai toujours pas dit à certains de mes frères et soeurs ainsi qu'à des amis proches", explique Patrice Evra Au Times.
"Vivre avec ça est l'un de mes plus grands regrets parce que j'aurais pu aider tant de gens. Je ne l'ai dit que maintenant à ma mère alors que j'ai 40 ans. Cela a été un gros choc pour elle avec beaucoup de colère. 'Tu ne dois pas le mettre dans ton livre, c'est privé, Patrice', m'a-t-elle dit. Mais je lui ai répondu que ce n'était pas à propos de moi, mais des autres enfants, et elle m'a répondu que c'était OK, qu'elle comprenait", a poursuivi Patrice Evra.
Danièle Guenoun, présidente de l'Association vendômoise de protection de l'enfance, a réagi à ce témoignage important et courageux.
"Tout ce qui peut dévoiler ces exactions, ces violences ne peut être que profitable à ceux qui, malheureusement, les subissent encore. Plus on en parlera, et plus on essaiera de faire en sorte qu'il y en ait de moins en moins", a-t-elle souligné sur Franceinfo.
"Des témoignages comme celui-ci, j'en reçois quasi quotidiennement. J'ai rencontré des jeunes adultes complètement démolis parce qu'on n'a pas eu envie de les entendre. Il faut entendre davantage les enfants, les adolescents, et prendre davantage en compte la façon qu'ils ont de manifester les violences qu'ils peuvent subir".
Après le témoignage accablant de la patineuse Sarah Abitbol, violée à 15 ans par son entraîneur, la voix de Patrick Evra permettra-t-elle de briser l'omerta des violences sexuelles dans le milieu sportif ? "Je veux que les gamins aient le courage (de parler) et ne se sentent pas coupables, parce que je me suis toujours senti coupable", confie-t-il.