Michèle Lachowsky : Il n'y aucun médicament, aucun produit alimentaire qui ne soit sans danger. Je pense que refuser à des personnes qui ne sont pas médecins le droit de prescrire un moyen de contraception - l'autorisation avait été envisagée pour les sages-femmes pour permettre aux jeunes mères de reprendre plus rapidement la pilule - règlera une partie du problème.
La prescription d'une pilule contraceptive n'est pas l'affaire de trois secondes, on ne choisit pas sa contraception comme on choisit des bonbons. Pour chaque méthode, l'évaluation des risques par rapport aux bénéfices est sérieusement prise en compte.
Je regrette que cette psychose vienne perturber des femmes qui étaient enfin soulagées d'avoir trouvé un moyen efficace de contrôler leur fertilité. Ces soupçons risquent malheureusement d'être lourds de conséquences dans les relations entre les patientes et leur praticien.
M. L. : Nous avions le sentiment qu'elles contenaient moins d'œstrogènes, cette hormone pouvant agir de façon indésirable sur les veines et favoriser la survenue de thrombose veineuse. Les risques d'acné, de prise de poids ou d'augmentation du cholestérol étaient également réduits. Il semblait donc évident que la pilule de troisième génération offrait une meilleure tolérance que celle de première et de deuxième génération.
J'ai lu ici et là que les gynécologues prescrivaient davantage la dernière génération de pilule « pour se remplir les poches » ; un raisonnement aussi affreux qu'insensé. Pensez-vous réellement que nous ayons un quelconque intérêt à engager notre responsabilité en prescrivant un médicament que nous savons pertinemment dangereux pour nos patientes ?
M. L. : Absolument pas. Les patientes auxquelles la pilule de troisième génération a été prescrite depuis plus de six mois et qui la supportent bien n'ont aucune raison d'en changer. Je leur recommande même instamment de poursuivre avec leur contraceptif habituel car c'est lors d'un éventuel changement de pilule, en raison de l'adaptation de l'organisme à une nouvelle molécule, que des problèmes peuvent apparaître et un drame survenir.
Je tiens à préciser un élément que l'on passe régulièrement sous silence dans cette polémique : la première jeune femme ayant porté plainte et dont la vie est, je le regrette, aujourd'hui fichue, avait une anomalie de la coagulation, un facteur V de Leiden. Ses complications auraient donc pu survenir à n'importe quel instant, plus précisément lors d'un déplacement en avion ou au moment de sa première grossesse. En effet, les risques de thromboses sont six fois plus élevés pendant la grossesse et ce, pour n'importe quelle femme. Doit-on pour autant interdire aux femmes de tomber enceinte ?
M. L. : Culturellement, la France est un pays qui prescrit beaucoup la pilule ; mais effectivement, il existe d'autres moyens de contraception tout aussi efficace. Je pense notamment au stérilet ou au diaphragme. Pour le stérilet, il faut s'assurer qu'il n'y ait aucune infection génitale avant la pause et aucun risque d'IST (infection sexuellement transmissible) dans les années qui suivent. J'ai donc l'habitude d'exiger de mes patientes ayant un stérilet qu'elles veillent encore plus qu'à l'accoutumée à utiliser un préservatif lors de leurs rapports, d'autant plus si les partenaires sont multiples.
Le diaphragme est, quant à lui, rarement prescrit aux adolescentes car il est contraignant et douloureux. Il doit être posé avant l'acte sexuel, laissé en place au minimum huit heures après et enlevé, au maximum, dans les 24 heures suivant la relation. La prescription dépend beaucoup du rapport de la patiente à son corps, car elle ne doit pas avoir peur de se mettre un doigt dans le vagin. Le diaphragme est par ailleurs déconseillé aux femmes ayant déjà eu plusieurs enfants.
On peut également citer l'implant ou le patch mais, quoi qu'il arrive, hormis pour les patientes ayant vraiment peur des effets de leur pilule de troisième génération, je conseille vivement de ne pas la remplacer par une autre, et surtout, de garder confiance en son gynécologue.