Elle est la star de l'une des meilleures séries françaises. Mais également une voix comme aucune autre, d'une résolue gravité. Et une présence magnétique remarquée chez Claude Chabrol, la cinéaste féministe Chantal Akerman, Audrey Diwan...
Elle, c'est Anna Mouglalis, tête d'affiche de Baron Noir... Qui nous a de nouveau terrassé, cette fois-ci hors des écrans. Effectivement, la comédienne a témoigné dans le cade de la Commission d'enquête aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité, à l'Assemblée nationale. Laquelle avait notamment donné lieu à une prise de parole bouleversante de l'élue écologiste Sandrine Rousseau : une séquence très éprouvante à retrouver ici.
Ou à ce témoignage tout aussi bouleversant.
Et dans le cadre de ces révélations personnelles si dures à digérer, Anna Mouglalis dénonce notamment la proposition, à ses tout débuts dans le monde du cinéma (en 1997)... du psychanalyste Gérard Miller, scénariste du film Terminale, l'un de ses premiers rôles marquants.
En cette fin des années 90, alors qu'elle est âgée de 20 ans, Gérard Miller propose à la jeune comédienne de l'inviter chez lui pour "peaufiner le scénario". "C'est normal d'avoir confiance, quand on est envoyé par la production, chez un scénariste, qu'on a envie de jouer dans un film", explique dans un premier temps la comédienne. "Tout ça devrait être très normal...".
Mais c'est à ce moment, dans l'hôtel particulier où il loge, boulevard Voltaire, que Gérard Miller lui suggère... Une séance d'hypnose.
Pour rappel, cinquante femmes dénoncent au sein des grandes enquêtes du magazine ELLE le "modus operandi" présumé de Gérard Miller : des séances d'hypnose, justement, à son domicile, sur des femmes, parfois de très jeunes femmes, suivies de massages, sur le corps, sur la poitrine, sur les fesses, et d'agressions sexuelles.
Agressions, ou viols, faits présumés dont se serait rendu coupable le psychanalyste, sur des femmes passives, soutiennent les très nombreuses plaignantes auprès de ELLE, et du magazine Envoyé Spécial, qui a également mené l'enquête.
Un grand nombre de ces dizaines de femmes évoquent tour à tour des "trous noirs", des "oublis", suite à ces séances d'hypnose. Le principal concerné nie quant à lui l'absence de consentement, mais pas toujours la nature sexuelle de ce qui est justement dénoncé.
Anna Mouglalis poursuit donc son témoignage sur sa rencontre avec Gérard Miller.
Elle précise que cette curieuse proposition, celle de la séance d'hypnose donc, elle l'a refusée nette, déconcertée. Là, elle sent soudainement que l'atmosphère change, au sein de cette chambre, en compagnie du psy très médiatique, suite à ce refus.
"Il commence dès lors à se tendre et à devenir un petit peu agressif...".
"Il me dit : 'ben alors qu'est-ce qu'on va faire et qu'est-ce qu'il faut faire sur ce scénario ?'. Je lui dis qu'on a qu'à rien faire du tout, vu comment c'est parti, c'est pas la peine... Et là il me répond qu'il retirera donc les répliques de mon personnage pour les donner à d'autres actrices. Je lui dis tant mieux"
Une conversation qui tourne court donc. Mais ce n'est pas tout...
"À l'époque, je n'en ai pas parlé au réalisateur, ni au producteur, j'aurais dû", déplore aujourd'hui l'actrice. "Mais comme en fait, je suis partie, je me suis dit 'en fait, c'est juste un connard".
Cependant, la comédienne révèle une chose, et pas des moindres : "Pendant le tournage, deux jeunes femmes ont parlé devant nous ouvertement. Elles ont vécu la séance d'hypnose et les agressions".
L'âge de ces femmes ? Entre 18 et 20 ans, juge l'actrice.
Anna Mouglalis ne s'arrête pas là dans son témoignage.
Elle désire également fustiger le sexisme de tout un système, celui du cinéma français, en cohésion avec le mouvement #MeToo. C'est cela qu'elle qualifie ainsi : "C'est un enfer !". Ajoutant même à travers son témoignage qu'elle a bien des "choses délirantes" à révéler au public.
Comme lorsque pour la promo du film Merci pour le chocolat (2000) de Claude Chabrol, la production lui aurait demandé "de participer au salon du chocolat, vêtue d'une robe en chocolat, afin que les visiteurs puissent directement se servir sur elle, jusqu’à la dénuder entièrement", tel que le relate le magazine ELLE.
L'état d'esprit d'une époque qu'on espère révolue.