Durant mes cours de yoga, certains professeurs concluent le cours par des chants en Sanskrit. L'un d'eux revient souvent : "Lokah samastah sukhino bhavantu". Bien que moitié indienne, cela m'a pris plusieurs années pour apprendre la signification de ce mantra : "Puissent tous les êtres vivants être partout heureux et libres, et puissent mes pensées et mes actions contribuer au bonheur et à la liberté de tous". Une devise qui résonne fort chez moi, qui suis végane depuis 9 ans et pratique le yoga depuis 12 ans.
Vous l'avez peut-être remarqué : de nombreux yogis sont d'ailleurs végans. Mais savez-vous pourquoi ? Un mode de vie respectueux de toutes et tous, animaux compris, et la pratique ancestrale du yoga seraient en fait étroitement liés.
À notre époque, nous avons tendance à considérer le yoga comme une activité de bien-être physique, qui se focalise sur les "asanas", les postures. Mais à la base du yoga se trouvent huit fondements, détaillés dans les Yoga Sutras de Patanjali (oeuvre datant d'environ 200 ans avant J.C.), dont l'Asana n'est qu'un seul. On y trouve notamment les Yamas, cinq directives sur la manière d'agir envers soi-même et les autres, dont le premier est l'Ahimsa : la non-violence.
Ce principe fondamental repose sur le respect de la vie et le fait de ne pas se faire de mal à soi-même ni à autrui. Il semble logique, donc, de tourner le dos aux industries de la viande et autres produits issus de la souffrance animale, dans lesquelles des êtres sensibles sont confinés, mutilés, maltraités et mis à mort.
Le troisième "yama", ou directive, est l'Asteya, qui appelle à ne pas voler ni prendre à autrui et à s'opposer à toute exploitation, oppression et injustice. Cela signifierait donc de ne pas soutenir l'industrie laitière, par exemple, dans laquelle des vaches sont douloureusement séparées de chacun de leurs petits veaux pour que le lait leur étant destiné soit volé et vendu aux humains pour la consommation.
Notre corps est un temple
De nombreux yogis choisissent de passer à une alimentation végétale pour leur santé et leur bien-être physique. Se passer de viande, oeufs et produits laitiers est associé à des taux de cholestérol et de tension artérielle inférieurs, et à un risque beaucoup moins élevé de souffrir de diabète, de certains types de cancer et de maladies cardio-vasculaires.
Pourquoi tant de postures de yoga portent-elles le nom d'espèces animales ? Une théorie serait que les premiers yogis se basaient sur l'observation des animaux qu'ils voyaient autour d'eux et s'en inspiraient dans leur pratique.
La plupart d'entre nous avons vu nos toutous s'étirer après une bonne sieste en posture du chien tête en bas ou nos chats courber l'échine. On adopte lors de nos séquences l'immobilité du lézard, l'envol du corbeau, l'éveil du cobra, ou les battements répétitifs des ailes du papillon. En incarnant un animal, le temps d'une pose, nous faisons l'expérience de la manière simple et franche par laquelle il vit sa vie et répond à ses besoins.
Lorsque nous adoptons sa position, mettons-nous à la place du cobra qui ne veut pas finir en sac de luxe, du chameau qui ne veut pas être battu pour le forcer à porter de lourdes charges ou du poisson qui souffre lorsqu'il est pêché pour finir dans notre assiette, et de tout autre animal, qui comme nous, a ses propres désirs et intérêts à vivre.
À la racine du yoga se trouve donc la non-violence, le respect du temple qui est notre corps et de l'environnement qui nous entoure. Peu étonnant donc, que tant de yogis se tournent vers un mode de vie permettant d'aligner leur pratique et leurs actes quotidiens, et d'alléger leur corps et leur conscience. Cette Journée internationale du yoga est l'occasion parfaite d'explorer la base de cette discipline de plus en plus populaire et de trouver le parfait équilibre entre nos convictions et nos actions.
Par Anissa Putois