Dans l'inconscient collectif, quand une femme doit faire face à une situation très stressante, on l'imagine volontiers craquer sous la pression, incapable de rester maîtresse de ses émotions. Un homme, au contraire, est perçu comme placide et serein, prêt à régler la situation sans trop transpirer.
C'est pourtant tout le contraire qui vient d'être prouvé par une étude menée par l'Institute of Labors Economics et repérée par Quartz. Quatre chercheurs allemands ont cherché à déterminer si ce préjugé tenace sur les femmes au travail avait, ou non, un fond de vérité. "Il y a plusieurs études qui montrent que les femmes ne veulent pas entrer dans un environnement concurrentiel, qu'elles n'aiment pas la concurrence", a déclaré à Quartz Alex Krumer de l'Université de Saint-Gall et co-auteur de l'étude. Cette réticence à s'affirmer dans une situation concurrentielle et cette difficulté à faire face à une situation de stress conditionnerait d'ailleurs les trajectoires professionnelles des femmes : à compétences égales, elles sont moins bien rémunérées que leurs confrères masculins et restent largement sous-représentées aux postes à hautes responsabilités, ainsi que dans les professions bien rémunérées et à croissance rapide, comme les sciences, le high-tech et l'ingénierie.
Pour déterminer si les femmes résistent effectivement moins bien à la pression, les chercheurs se sont attelés à l'analyse des résultats du Grand Chelem de tennis. Les rencontres de quatre compétitions internationales – l'US Open, l'Open d'Australie, Wimbledon et Roland Garros – ont été passés au crible par les chercheurs. Cela représente en tout 4 127 matchs de femmes et 4 153 matchs d'hommes.
Résultat ? Les tenniswomen réussissent bien mieux leurs matchs que les hommes sous la pression et craquent bien moins qu'eux.
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont analysé des dizaines de scénarii et de facteurs afin de déterminer si le stress affectait ou non les performances des joueurs et des joueuses. Ils se sont particulièrement intéressé au moment où le score atteint 4-4 pour savoir si une fois le score à égalité, la pression s'intensifiait effectivement pour les joueurs. Au tennis en effet, pour remporter un set, il faut arriver à six jeux tout en ayant deux jeux d'avance sur son adversaire.
Il s'est avéré qu'arrivé au moment fatidique 4-4, les hommes perdaient au service 7,2% de plus qu'au début du match. Au contraire, "il n'y a eu aucun changement, aucun effet sur les femmes. Elles jouent exactement de la même manière", explique Alex Krumer.
Les résultats sont encore plus convaincants si l'on considère que la première série est plus importante dans le tennis féminin, puisque la victoire se base sur les résultats des trois meilleurs sets. Le tennis masculin se joue lui en cinq sets.
Pour les chercheurs, il existe une raison pour laquelle les femmes craquent moins sous la pression que les hommes. Cette raison, c'est le cortisol. Cette "hormone du stress" est sécrétée par notre cerveau lorsque nous sommes soumis à une forte pression. À très haute dose, le cortisol affecte le raisonnement et la cognition. Il s'avère que dans les situations à haut stress, les niveaux de cortisol augmentent plus rapidement chez les hommes que chez les femmes.
Mais ce qui est vrai pour des sportives de niveau international l'est-il aussi pour des femmes en situation de stress au travail ? Les auteurs de l'étude eux-mêmes reconnaissent que cette dernière présente des limites. En effet, les femmes étudiées sont des athlètes entraînées pour faire face à des niveaux élevés de stress que nous ne pouvons imaginer. Il faut aussi prendre en compte d'autres facteurs, tels que l'environnement, les raisons du stress et l'identité des adversaires que l'on doit affronter.
Des recherches antérieures sur la résistance des femmes à la pression ont d'ailleurs généré des résultats plus mitigés. Une étude précédente avait ainsi montré que les hommes voient leurs performances s'accroître lorsque la compétition augmente. Les femmes, elles, ne se montraient plus performantes que si elles étaient en concurrence avec une autre femme, et non un homme.
D'autres recherches ont aussi montré que les femmes avaient tendance à sous-performer lors des examens d'entrée à l'université, ce qui n'était pas le cas des hommes.