Société
La cravate, "symbole phallique de l'homme blanc", fait débat au parlement néo-zélandais
Publié le 11 février 2021 à 13:04
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Et si la plus banale des cravates était un symbole de la phallocratie blanche qui résiste (encore) au sein du parlement néo-zélandais ? Des voix critiques s'interrogent après l'expulsion du député maori Rawiri Waititi, lequel avait osé délaisser le bout de tissu.
La cravate, symbole de la phallocratie blanche au Parlement néo-zélandais ? La cravate, symbole de la phallocratie blanche au Parlement néo-zélandais ?© Adobe Stock
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Le port de la cravate est nécessaire pour les députés - masculins - au sein du parlement néo-zélandais. Cela, c'est le président de ladite Chambre, Trevor Mallard, qui l'affirme. Il se voit soutenu par le député Chris Hipkin, qui envisage en ce bout de tissu "un signe de respect". Oui mais voilà, certaines voix, comme la professeure Claire Robinson, spécialiste en communication politique, voient là un fétiche anachronique, mais surtout un code vestimentaire "phallique et dépassé" de la "domination masculine blanche" au parlement néo-zélandais.

La preuve ? Suite à son récent refus de porter la cravate, le député maori Rawiri Waititi a été tout bonnement expulsé du parlement néo-zélandais. Rien que ça. A écouter Waititi, ce code vestimentaire occidental serait une tentative de supprimer la culture autochtone. Rawiri Waititi a même comparé le noeud de la cravate à un "noeud coulant colonial". Une image puissante, faisant écho à l'histoire tumultueuse de la culture maorie.

Pour Claire Robinson, il y a comme un paradoxe entre les ambitions d'inclusion indéniables du gouvernement néo-zélandais et l'usage archaïque de la cravate, hérité de la braguette, ce rabat en tissu conçu il y a 500 ans "pour souligner l'importance des nobles européens", forme de flèche et grande taille phallique à l'appui. De quoi réjouir Sigmund Freud. Mais pas vraiment les partisans à l'égalité (des sexes, et pas que), soucieux de se dissocier d'emblèmes hiérarchiques nous renvoyant aux temps immémoriaux de l'Angleterre victorienne.

"S'il y a bien une année pour changer le code vestimentaire parlementaire anachronique, ce devrait être 2021, alors que le nouveau parlement néo-zélandais est le plus diversifié et le plus inclusif de tous les temps, avec 48% de femmes, 11% de LGBTQ, 21% de Maoris, 8,3% de Pacifique et 7% d'Asiatiques", explique la spécialiste de la communication.

Des réserves critiques bien légitimes.

Un accessoire dépassé ?

Pour Claire Robinson toujours, la cravate servirait, depuis des siècles déjà, à maintenir sans en avoir l'air les codes et statuts hiérarchiques des hommes blancs comme étant la norme. Respect de l'institution ? Souci d'élégance ? Simple habitude vestimentaire ? L'universitaire voit plus loin : les vêtements sont intrinsèquement politiques "dans leur capacité à représenter les valeurs de notre culture". Culture patriarcale et blanche, pour le coup.

Et ce ne sont pas des voix emblématiques comme celles d'Alexandria Ocasio-Cortez ou Kamala Harris qui viendront contredire cette analyse. Les leadeuses nous rappellent à chaque apparition que fringues et fashion sont absolument politiques, parfois autant qu'un slogan. Cette idée de cravate comme volonté de standardiser cultures et identités est plutôt bien illustrée par le député maori, qui l'a retiré en geste de soutien à ses ancêtres.

Le souhait de Claire Robinson suite à ce fiasco ? Que les cravates ne soient plus obligatoires au sein du parlement néo-zélandais, mais facultatives. Un premier pas timide mais attendu pour briser quelque peu les codes.

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