L'initiative n'a pas fait l'unanimité. Alors que la métropole annonçait fièrement la fin du premier tronçon des Voies lyonnaises, projet réalisé avec la volonté de "concevoir des pistes non genrées et donc inclusives", les opposant·es à la mairie écolo de Grégory Doucet ont exprimé leur mécontentement.
"Idéologie en roue libre", a fustigé le Rassemblement de la droite, du centre et de la société civile de Lyon qui critique la "capacité créatrice sans bornes de la Nupes locale". "Ne me demandez pas ce que c'est, je cherche comment une route peut être sexiste", ironise à son tour la journaliste de L'Opinion Emmanuelle Ducros.
Des railleries imitées par des citoyen·nes qui déplorent les efforts et budgets alloués à ce sujet, et non à l'endiguement de la violence. Une polémique née en réaction à la fusillade survenue dans le quartier de la Duchère, où deux personnes ont été abattues.
Pourtant, les pistes cyclables non genrées et inclusives s'attaquent elles aussi au fléau de l'insécurité : celle des femmes et des personnes en situation de handicap dans l'espace public.
Comme l'a précisé Fabien Bagnon, vice-président de la métropole de Lyon chargé des voiries et mobilités, sur Twitter, l'inclusivité dans ce cas précis, "c'est la possibilité d'avoir des pistes cyclables suffisamment larges et sécurisées pour permettre à des personnes en fauteuil roulant de se déplacer avec leurs vélos adaptés. Ou à des familles de se sentir libre de circuler avec leurs enfants."
Le terme "non genré" s'explique quant à lui par le fait de "chercher à identifier ce qui peut freiner son utilisation par un genre".
"Est-ce un problème d'éclairage nocturne ? Est-ce que la piste est monopolisée pour des usages sportifs principalement masculins ?", interroge-t-il. Des problématiques qui émanent de travaux étayés, réalisés par les services d'urbanisme et des sociologues, ajoute-t-il, qui épinglent notamment des pistes "conçues par des hommes, pour des hommes".
Interviewé par L'Obs, Matthieu Adam, géographe chargé de recherches au CNRS et membre du laboratoire Environnement ville société de l'université de Lyon, insiste : le consensus scientifique autour d'une pratique du vélo "inégalitaire du point de vue du genre" est clair. 60 % des cyclistes sont des hommes, contre près de 40 % de femmes. "Dès leur plus jeune âge, les garçons apprennent à investir l'espace public, à pratiquer des activités sportives", poursuit-il. "Alors qu'on explique aux filles que ce même espace est risqué."
Plus tard, le vélo devient même "une possibilité d'émancipation" pour les femmes, note le scientifique, qui leur "permet d'échapper au harcèlement de rue". Décidément assez d'arguments pour saluer le projet, ou au minimum, ne pas le tourner en dérision.