En cette Journée Internationale des Droits des Femmes, il fait bon se plonger dans des lectures militantes et incarnées, qui font bouger les lignes et défendent un idéal - l'égalité des genres. Idéal qui concerne autant notre présent que notre futur. D'où l'importance d'aborder ces enjeux en compagnie de nos chères petites têtes blondes. De nos enfants, mais aussi de nos ados.
Cela tombe bien, le féminisme s'invite régulièrement dans la littérature jeunesse, des fictions aux documents. Démonstration en 8 opus réjouissants à dégoter illico dans votre librairie préférée.
Manuel qui nous rappelle si besoin était l'utilité publique des livres publiés par La ville brûle, maison d'édition féministe et indépendante, Tu n'es pas obligée remet sur le devant de la scène et à travers la voix érudite de la documentariste Ovidie des notions capitales et parmi elles : le consentement.
C'est indispensable, à l'heure où de nombreuses associations comme SOS Homophobie et le Sidaction insistent sur l'importance de l'éducation à la sexualité au sein des collèges et lycées. Lors de la dernière rentrée scolaire, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes nous alertait quant à la montée et à la banalisation des violences sexistes et sexuelles chez les jeunes : la culture du viol serait prégnante dans la cour de récré.
On réagit avec cette lecture nécessaire.
Petits formats, une soixantaine de pages, une variété de profils iconiques et inspirants... On ne saurait trop vous conseiller la collection "Les grandes vies" proposée par Gallimard Jeunesse à destination des 6 ans et plus. Une série de biographies illustrées pour découvrir la vie passionnante de ces femmes qui ont marqué l'histoire. Par exemple ? Simone Veil, Marie Curie, Joséphine Baker... Et donc, Frida Kahlo.
Liberté, création artistique, intensité graphique, poésie, amour... "Frida" captive, car elle semble être mille femmes en une. Ses tableaux comme sa vie sont parcourus de tragédies mais également d'audace et d'espoir. La raconter, c'est tourner une page d'histoire (la révolution mexicaine) et... d'émancipation féminine. Et en couleurs s'il vous plaît.
Le titre est extra, le concept aussi : ce livre de poche introduit par une citation de Virginie Despentes a été écrit par une jeune féministe de 16 ans, délivrant ses réflexions persos (et documentées) l'espace de douze chapitres d'une limpidité indéniable. Tous les ados devraient lire cet état des lieux partant d'un constat simple ("le sexisme est partout") pour passer au crible le "body shaming", le harcèlement, la sexualisation des corps féminins...
Surtout, Candice de Léo déboulonne les stéréotypes de genre, interroge la masculinité toxique, la construction de l'hétérosexualité et la masculinité "positive", observant que "les hommes sont aussi victimes de la société patriarcale", dès le bahut. Son corpus enthousiasmant oscille quant à lui de Titiou Lecoq à la série Sex Education, des comptes Insta décomplexés (Jouissance Club) aux mots de Vanessa Springora. Indispensable.
Pour une plus jeune audience, cet album jeunesse proposé par On ne compte pas pour du beurre, maison d'édition qui bouscule les stéréotypes de genre. Patatouille est une histoire rigolote et intelligente sur les codes de la masculinité, les "trucs de garçon" qui n'en ont que le nom, l'éducation genrée tendance "boys don't cry", "le rose c'est pour les filles", et autres absurdités.
L'espace d'un court récit qu'elle dédie à son jeune garçon, l'illustratrice Tiffany Cooper convoque l'imaginaire (l'imposant Patatouille) pour mieux nous inviter à penser au-delà des clichés. C'est oui.
Coline Pierré a signé l'un de nos romans favoris de l'an dernier : Pourquoi pas la vie, qui imagine l'existence de Sylvia Plath, légende de la poésie américaine, si cette dernière ne s'était pas donnée la mort au tout début des années soixante. Mais c'est avant tout au sein de la littérature jeunesse que l'autrice évolue.
Fiction young adult, En couple épouse le point de vue d'une ado en pleine rupture pour questionner l'injonction à vivre à deux, déjà très forte au lycée. C'est quoi être "en couple" au juste, dans une société patriarcale ? Quand on est hétéro, ou queer, et quand on a des convictions fortes ? Quelles sont les conventions à respecter ? Et si on s'en émancipait ? Comment l'amour s'exprime là-dedans ? Et la sexualité ? Un récit féministe plein de justesse.
Voilà une riche idée : proposer une édition adaptée aux plus jeunes du célébrissime manifeste de l'autrice nigérianne Chimamanda Ngozi Adichie, plongeant dans son enfance et sa vie pour en appeler à l'égalité des sexes.
Un discours inspirant au possible qui a été validé et largement médiatisé par Beyoncé en personne, et qui se voit ici enrichi par les illustrations pleines de vie de Leire Salaberria.
Autre opus estampillé La ville brûle et accessible dès l'adolescence, ce "petit manifeste pour une révolution du regard" qui permet à l'autrice Iris Brey de synthétiser ses réflexions stimulantes sur la représentation des femmes au cinéma, la prédominance du regard masculin (celui du cinéaste, comme du spectateur), la manière dont tout cela influe la mise en images du consentement, de la sexualité des femmes, de leur désir...
Mais aussi, du viol, et ce, même dans les séries les plus pop comme Game of Thrones. Lecture importante, car les stéréotypes, le sexisme, les violences, sont indissociables de ce que les écrans, petit ou grand, proposent aux plus jeunes.
Et si on bousculait le tabou des règles dès le plus jeune âge ? C'est ce que propose ce petit livre jeunesse abordant aussi bien les menstruations à travers la propre expérience de son autrice qu'en invoquant recherches et réflexions sur tous les préjugés et complexes encore indissociables de cette intimité rouge. Pourquoi le lire ? Car les règles constituent encore un impensé. Car la précarité menstruelle est un enjeu de société plus fort que jamais. Car cela concerne tout le monde.