Culture
De "Scream" à "Baise-Moi", 8 films féministes à (re)voir sur Netflix
Publié le 31 mars 2020 à 16:08
Par Clément Arbrun | Journaliste
Passionné par les sujets de société et la culture, Clément Arbrun est journaliste pour le site Terrafemina depuis 2019.
Du cinéma de Miyazaki à "Scream" en passant par Virginie Despentes, le catalogue Netflix regorge de films féministes. Des séances idéales pour occuper votre confinement.
Revoir Dirty Dancing sur Netflix Revoir Dirty Dancing sur Netflix© Artisan Entertainment
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Puisque livres, podcasts et comptes Instagram ne suffisent pas toujours à occuper notre esprit durant ce confinement, on se rend illico sur Netflix histoire de combler ses lacunes ou chercher la perle rare. Mais comment s'y retrouver dans ce catalogue foisonnant ? Pas de panique, on a sélectionné pour vous quelques petits classiques ou ovnis du cinéma que l'on aime : girl power et inspirant, subversif et stimulant, forcément féministe. Des oeuvres à la fois pop et complexes, aux personnages féminins imparfaits et iconiques, toujours marquants.

Suivez le guide.

"Colossal" de Nacho Vigalondo
"Colossal", petite perle avec une exceptionnelle Anne Hathaway. © Neon

Elle a perdu son job, son petit copain l'a plaquée, sa santé mentale n'est pas au beau fixe... C'est le moral à zéro que Gloria, working girl new-yorkaise, retourne dans sa province natale. Là-bas, elle retrouve Oscar, un ami d'enfance. Mais très vite, des événements pour le moins inattendus vont bouleverser son quotidien... Et en dire plus serait vous dévoiler le caractère ovniesque de cette oeuvre qui ne ressemble à aucune autre.

Portrait d'une femme malade qui, noyée dans ses pathologies, va trouver un drôle de moyen de s'en libérer, Colossal offre à Anne Hathaway l'un des meilleurs rôles de toute sa carrière. En jeune anti-héroïne au passé énigmatique et au potentiel tragique indéniable, elle nous bouleverse tout simplement. Bousculant nos attentes jusqu'à faire dégringoler les frontières du réel, cette petite perle redéfinit l'archétype de la "femme forte" d'une manière spectaculaire, avec beaucoup de ludisme et d'audace.

"Divines" de Houda Benyamina
"Divines" et son discours clito-power. © Diaphana

"J'arrête pas de dire j'en ai rien à foutre de Cannes à mon producteur depuis le début. Mais on est là quoi, on est là !". On ne peut pas dire que la réalisatrice Houda Benyamina garde sa langue dans sa poche en recevant non sans émotion le prix de la Caméra d'or au Festival de Cannes 2016 pour son film Divines. Pas de surprise toutefois : la cinéaste est à l'image des protagonistes qu'elle met en scène dans son oeuvre punchy.

On y suit les péripéties d'une "bande de filles", dont la jeune Dounia et sa meilleure amie Maimouna, cherchant à déserter leur quotidien morose en banlieue, un adage très rihannesque à l'appui : "Money money money". Mais de cette histoire de romance, de trafics et d'argent, on retiendra une autre réplique, devenue culte dès la sortie du film : "Toi, t'as du clito !". Une jolie variation d'un langage trop phallocentré pour un premier long-métrage plein d'énergie.

"Princesse Mononoké" de Hayao Miyazaki

 

"Princesse Mononoké", une icône de notre imaginaire féministe. © Studio Canal

De tous les classiques d'Hayao Miyazaki disponibles sur Netflix France (Le Château dans le ciel, Mon voisin Totoro, Le Voyage de Chihiro), celui-ci est sans conteste l'un des plus mémorables. Film d'aventures épique narrant les périples du guerrier japonais Ashitaka, jeune homme contaminé par une entité démoniaque, cette fable écologiste met à l'honneur l'un des plus beaux personnages féminins nés de la main de l'auteur : la princesse Mononoké donc, alias San, femme-louve redoutable et iconique.

A l'instar du Voyage de Chihiro et de Nausicaä de la Vallée du Vent, Mononoké témoigne de la qualité féministe des dessins animés du réalisateur japonais. Miyazaki déploie des féminités troubles, tantôt divines tantôt vulnérables, attachantes et ambiguës, sources d'angoisses comme d'espoirs, toujours indépendantes, aussi bien Reines en leur environnement que mises en danger par ce dernier. Fascinant.

"Dirty Dancing" de Emile Ardolino
"Dirty Dancing", l'un de nos premiers coups de coeur girl power ? © Artisan Entertainment

Vous connaissez la chanson. La timide Frances (ou Frédérique), alias "Bébé", le charismatique danseur Johnny Castle, le caractère dépaysant des montagnes Catskill, un tube (Time of my life)) ou plutôt deux (She's Like The Wind), une choré qui nous éjecte au septième ciel, de la sensualité, des répliques kitsch... On ne se lasse pas de (re)découvrir ce film à la fois diablement cheesy et moins nunuche qu'il n'y paraît qu'est Dirty Dancing.

Pour son attrait nostalgique bien sûr, mais aussi pour son scénario signé Eleanor Bergstein, où s'entremêlent des thèmes aussi essentiels que l'émancipation féminine, la sexualité et l'avortement. Pas évident de placer tout cela entre deux hits musicaux et quelques pirouettes du légendaire Patrick Swayze, et pourtant, la recette fonctionne à fond. Trente trois ans après le succès en salles de Dirty Dancing, Jennifer Grey est encore un véritable role-model, et ces mélodies pop séduisent autant qu'elles libèrent.

"Baise-moi" de Virginie Despentes et Coralie Trinh Thi
La radicalité nécessaire de Virginie Despentes. © Pan Européenne Distribution

Du Virginie Despentes sur Netflix ? Et oui ! Et pas des moindres. Car cette adaptation sulfureuse de l'un de ses plus fameux romans, que l'autrice a co-réalisé avec la comédienne Coralie Trinh Thi, est peut-être son oeuvre la plus frontale et radicale. Du cinéma explicite et corrosif (classé X lors de sa première exploitation), relatant les déroutes meurtrières de deux femmes bien décidées à faire payer aux hommes leur violence et leurs perversités.

Mise en pièces du patriarcat et réflexion politique sur la pornographie, Baise-moi est un film sans concessions, de ces manifestes qui ne laissent pas indemne. Sa rage salutaire nous renvoie à cette citation de King Kong Théorie : "Je suis furieuse contre une société qui m'a éduquée sans jamais m'apprendre à blesser un homme s'il m'écarte les cuisses de force".

"Scream" de Wes Craven
"Scream", le slasher le plus féministe ? © Dimension Films

Qui est "GhostFace", le tueur au masque blanc qui sévit à Woodsboro et fait régner la terreur sur le campus ? L'étudiante Sidney Prescott ne va pas tarder à le savoir : elle est déjà dans son viseur. Scream n'est pas juste une comédie noire postmoderne revisitant les codes du slasher-movie (ces films d'horreur opposant ados libidineux et serial killers mystérieux), c'est aussi une ode à ces femmes sans qui ces divertissements seraient bien vains.

En l'occurrence, impossible d'imaginer le cinéma des années 90 sans Neve Campbell, cette Sidney au regard noir, au corps constamment martyrisé et au vécu tout à fait dramatique, échappant en solo aux griffes du cinglé qui souhaite sa mort. Ou plutôt "des" ?... D'un épisode à l'autre, Scream (re)pense le genre de l'épouvante comme une malédiction faite à la gent féminine, condamnée à fuir et à hurler, mais aussi à combattre et vaincre un mal bien souvent... mâle. Et il n'y a pas mieux que Sidney Prescott pour esquiver les lames blanches du patriarcat.

"Booksmart" d'Olivia Wilde
"Booksmart", une comédie empouvoirante. © Netflix

Premier long-métrage de l'actrice Olivia Wilde (Dr House, Tron : L'héritage, Lazarus Effect), Booksmart est un teen movie empouvoirant dépeignant la quête "d'éclate" de deux élèves studieuses de terminale. Un film bien fun dont la liberté ne plaît pas à tout le monde : en novembre dernier, une compagnie aérienne a carrément censuré certaines de ses séquences, d'une scène d'amour lesbien à une évocation de la masturbation féminine.

Férue de films pour ados type Breakfast Club ou La folle journée de Ferris Bueller de John Hugues, Olivia Wilde chérit les oeuvres qui célèbrent "l'indépendance de la jeunesse", dit-elle. Mais force est de constater que ces classiques ne bénéficient pas de personnages féminins très complexes. D'où l'importance de moderniser le genre en donnant le "la" à deux adolescentes. En résulte une chronique drôle, très autobio et irrévérencieuse.

"Jessie" de Mike Flanagan

"Jessie", du Stephen King façon "Balance ton porc". © Netflix

Bon d'accord, Jessie n'est peut-être pas le meilleur film à mater en ce moment puisqu'il relate le calvaire d'une femme attachée à son lit (par un mari "entreprenant", et surtout un sacré porc) et pour le moins embêtée lorsque son conjoint s'écroule sur elle... mort. Dès lors, comment va-t-elle se libérer de ses liens ? Et quels sont ces curieux bruits qui résonnent, là, aux pieds du lit ? On vous l'accorde, on est loin du confinement parfait.

Il n'empêche, cette histoire d'épouse abusée mais déterminée à se libérer d'un poids (aussi physique que symbolique) fait partie des meilleures adaptations à l'écran de l'univers de Stephen King. Il faut dire que le "matériau" d'origine est l'une des rares oeuvres féministes du romancier, qui accorde à ses personnages féminins une écriture tantôt cruelle et ambivalente, tantôt juste à souhait et empouvoirante. Carla Gugino porte sur ses épaules (celles d'une grande actrice) ce huis clos éclatant de l'ère #MeToo.

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Culture News essentielles confinement feminisme dessin animé cinéma Covid-19
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