Du 20 au 30 novembre 2021 aura lieu à Paris la nouvelle édition de Chéries-Chéris. Autrement dit, le premier festival de cinéma LGBTQ de France, ni plus ni moins. Un événement enthousiasmant et militant qui prendra place dans les salles MK2 (Bibliothèque, Beaubourg, Quai de Seine). Cela fait 27 ans déjà que Chéries-Chéris donne le la aux voix queer à travers une sélection forte, stimulante et touchante. Une programmation à retrouver ici.
"Les cinéastes de notre nouvelle édition font allègrement tomber les barrières entre les genres et bousculent par là-même même nos conventions et certitudes. A travers 64 longs-métrages et 66 courts, toutes les facettes de nos identités et nos personnalités sont interrogées : les plus évidentes et consensuelles comme les plus sulfureuses et radicales. Pour cette édition 2021, nos artistes vont crever l'écran !", assure en guise d'avant-goût Grégory Tilhac, le directeur artistique du Festival.
Un festival qui ose, donc, et se voit ponctué de très belles surprises. La preuve avec ces trois films étonnants et émouvants issus de la sélection, conciliant par le prisme des identités queer les formats fiction et documentaire.
Long-métrage allemand d'une mélancolie diffuse, Seule la joie narre la rencontre émouvante entre deux travailleuses du sexe, Sascha et Maria, oeuvrant au sein d'une maison close. L'une est expérimentée et spleenétique, l'autre est une poétesse queer fan de Xena la guerrière – qu'elle qualifie de "lesbienne originelle". Toutes deux vont vivre une relation où se conjuguent passion et vulnérabilité.
Par-delà la performance de ses deux actrices principales, c'est la mise en scène naturaliste de la cinéaste Henrika Kull qui fait tout le sel de cette chronique sentimentale. Sa caméra au plus près des visages et des affects, sa manière d'entremêler séquences crues en compagnie de clients et scènes d'amour à deux pleines de pudeur.
Un portrait de femmes marginales placé sous le signe du female gaze, de la tendresse et de la sensualité, qui interroge aussi bien les sentiments que la notion de féminité.
Attention, OVNI. A travers la forme d'un documentaire au rythme hypnotique, Ultraviolette du réalisateur français Robin Hunzinger relate le quotidien du "gang des cracheuses de sang". Autrement dit ? Pas des vampiresses, non, mais des jeunes femmes atteintes de la tuberculose, hospitalisées dans les années 20. Leur fragilité, mais aussi cette force qui les unit malgré tout, nous est contée en voix off à travers la plume de Marcelle, institutrice et amante d'une Emma à laquelle elle dédie des lettres retrouvées des décennies plus tard.
Un style littéraire plein de poésie et de lyrisme, illustré par des images fixes et mobiles au noir et blanc granuleux. Le tout est recouvert d'une musique électro contribuant à l'atmosphère si singulière de cette lointaine love story lesbienne dont l'amertume n'a d'égale que l'étrange beauté.
"Nous avions une liberté immense, nous nous aimions. Je voudrais enfermer nos deux années d'amour dans un coffret de bois. Te souviens tu de nos nuits ?", demande la narratrice à sa destinataire au fil de son monologue.
Une réflexion forte sur l'amour impossible et le temps qui passe.
Voilà un titre qui sonne comme un mot d'ordre militant, ou un slogan punchy inscrit sur une pancarte en manif. C'est justement la mobilisation qui anime les protagonistes de ce documentaire, portrait de femmes transgenres argentines se revendiquant travesties. A travers leurs discours et leurs luttes, Claudia et Violeta portent haut et fort leur vécu, leur cause et leur corps dans un pays marqué par la violence patriarcale et la précarité sociale.
En résulte un film important sur l'identité de genre et les discriminations dont les personnes transgenres sont encore bien trop victimes à travers le monde. Nos corps sont vos champs de bataille est également le fruit d'un travail de cinq ans de la part de sa réalisatrice, Isabelle Solas.
Une oeuvre résolument engagée donc, et qui à travers l'histoire et les prises de paroles de ces figures centrales, nous rappelle ô combien l'adelphité compte. Autrement dit, une sororité incluant toutes les personnes queer et non-binaires. Et qui s'exprime dans les marches et mobilisations.
Festival Chéries-Chéris
Du 20 au 30 novembre 2021 à Paris