La dépression post-partum n'existe pas simplement chez les mères : elle apparaît également chez les pères. En 2021, un sondage réalisé par l'institut Opinion Way révélait ainsi que 18 % des pères auraient déjà éprouvé de dures conséquences psychologiques dans les semaines suivant la naissance de leur enfant. Pourtant, le sujet de la dépression post-partum paternelle demeure encore de l'ordre de l'impensé.
Cette situation de santé mentale existe cependant bel et bien, et quelque chose pourrait en réduire les risques : le congé paternité. Voilà ce qu'affirme une nouvelle étude menée par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'Institut Pierre-Louis d'épidémiologie et de santé publique. La matière de ces recherches ? Les données de plus de 10 000 couples hétérosexuels.
Ce texte scientifique publié le 4 janvier rappelle tout d'abord qu'un père sur dix au cours de l'année suivant la naissance de leur enfant pourrait tout à fait faire l'objet d'une dépression post-partum. Or, là où 5,7 % des pères n'ayant pas pris de congé paternité faisaient état d'une telle dépression, ce n'était le cas que pour 4,5 % des pères ayant pris un congé paternité, selon l'étude. Un écart net donc.
Démonstration de l'utilité de ce congé ? Deux mois après la naissance de leur enfant, plus de 64 % des 11 000 pères pris en compte par l'Inserm avaient déjà pris un congé paternité. "Dans les semaines qui suivent la naissance d'un enfant, les deux parents sont susceptibles de développer une dépression. Le congé paternité, reconnu pour ses bénéfices sur l'équilibre familial, le développement de l'enfant et l'égalité femme-homme, pourrait être une des clés pour prévenir cette pathologie", affirme encore l'étude scientifique.
"Outre les avantages que le congé paternité peut conférer en matière de dynamique familiale et de développement des enfants, il pourrait donc également avoir des effets positifs en matière de santé mentale des pères", décrypte à l'unisson Katharine Barry, doctorante Inserm à Sorbonne Université et première autrice de ces travaux.
Tout est au mieux dans le meilleur des mondes, donc ? Pas vraiment, non.
Car, prenant également en compte les données de plus de 13 000 mères, l'étude a également conclu que 16,1 % des mères dont le partenaire a utilisé le congé paternité présentaient une dépression post-partum, contre 15,3 % de celles dont le partenaire n'avait pas pris de congé paternité. "L'association négative observée chez les mères pourrait suggérer qu'une durée de 2 semaines de congé paternité n'est a contrario pas suffisante pour prévenir la dépression post-partum des mères", déplore en retour l'experte Katharine Barry.
Les inégalités perdurent donc du côté de la santé mentale. Congé paternité ou non, la charge maternelle demeure très forte, et ses incidences psychologiques négatives, indéniables. Cependant, conclut la chercheuse, interroger ainsi la santé mentale des pères est une bonne chose : cela pourrait permettre de faire progresser "l'égalité des sexes sur le marché du travail et accroître la participation des pères à la sphère familiale".
Le congé de paternité en France est passé de 14 à 28 jours fractionnables, dont 7 obligatoires en 2021. Une mesure réclamée de longue date, mais encore en deçà des recommandations.