Charlotte Muller a 27 ans lorsqu'elle est diagnostiquée du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), après une année sans pilule et sans règles. Une condition qui entraîne des troubles de l'ovulation (voire carrément une absence d'ovulation, comme c'est son cas) et touche de plus en plus de femmes. 1 sur 5, exactement, "contre 1 sur 13 il y a une dizaine d'années", nous précise-t-elle. C'est aussi la principale cause d'infertilité en France.
La jeune femme, juriste à l'époque, entame dans la foulée un traitement lourd auprès d'un ponte du domaine, le docteur Claude Debache, traitement qui déclenche de nouveau ses menstruations, mais en intensifie les douleurs. Plus tard, elle entame plusieurs FIV. Toutes se révèlent infructueuses. Au fil de recherches pour accentuer ses chances de tomber enceinte naturellement, elle tombe sur une pratique énigmatique : le yoga de la fertilité, ou Fertility Yoga.
Une approche du yoga Hatha élaborée par la docteure américaine Alice Domar qui consiste en de longues postures, des respirations profondes en pleine conscience et un travail accentué sur l'ouverture des hanches, le tout pour s'adapter aux cycles hormonaux.
Charlotte Muller se prend de passion pour ce rituel, qu'elle décide d'importer en France après une formation auprès des seules professeures à l'enseigner : Lynn Jensen aux Etats-Unis, Sue Dumais au Canada et Ana Davis en Australie. En 2018, elle quitte son travail pour lancer son studio de Fertility Yoga à plein temps (en présentiel dans le 9e arrondissement de Paris, ou à distance via fertilityyoga.tv), et apporter à ses semblables une technique d'autant plus alléchante qu'elle affirme booster la fertilité.
Quand on sait qu'en France, un couple sur trois rencontre des problèmes pour procréer, la promesse fait rêver.
A l'origine du concept, il y a une discipline ancestrale apparue en Inde au 12e siècle : le yoga Hatha, à la fois doux et méditatif, idéal pour se délester d'un stress nocif. C'est d'ailleurs la raison première pour la docteure Alice Domar de se pencher sur ce type particulier. Elle qui, après des années à étudier l'impact des modes de vie contemporains sur la fertilité en collaboration avec l'Université de Harvard, découvre en 2010 la preuve de la relation entre stress et infertilité.
Elle s'attache même à démontrer les bénéfices réels de la pratique sur les femmes qui se lancent dans une fécondation in vitro (FIV) par le biais d'une étude aux résultats édifiants : le taux de grossesse s'élève à 52 % pour celles qui ont suivi deux cours de yoga de la fertilité par semaine pendant trois mois, contre 20 à 25 % pour celles qui ont entrepris une FIV seule. Et ce, principalement lorsqu'aux postures s'ajoutent une alimentation adaptée et des habitudes respectueuses de notre corps.
Comprendre : dénuée autant que possible des perturbateurs endocriniens qui, Charlotte Muller et de nombreux·ses expert·e·s l'assurent, induisent justement ces difficultés de plus en plus fréquemment rencontrées dans la conception d'un enfant. Elle est d'ailleurs persuadée que c'est en adoptant ce mode de vie plus sain qu'elle tombe finalement enceinte, après plusieurs fausses couches, début 2019.
Le Fertility Yoga "soutient le système endocrinien, et travaille sur les relations épiphyse, hypothalamus et hypophyse dans le but d'activer le système nerveux parasympathique, pour vous rendre plus résistante au stress et résiliente, ce qui contribue à la régulation vos niveaux hormonaux", décrit Charlotte Muller dans un communiqué. En fonction du stade de son cycle, on va ainsi pratiquer un yoga différent : dynamique de J5 à J14, doux et méditatif de J15 à J28.
"Chaque inspiration et expiration se fait en conscience", poursuit-elle. "C'est cette intention respiratoire qui vient stimuler les ovaires dans les postures (asanas) de Hatha sélectionnées. La pratique favorise l'alignement, l'assouplissement et l'ouverture de hanches et se clôture par des exercices de méditation, pour lâcher prise, apaiser le mental et gagner en optimisme." Mais aussi réduire les crampes menstruelles et les souffrances liées à l'endométriose.
Pour goûter à ce programme attractif, en plus des cours réguliers depuis Paris, il y a la retraite Healthy Hormones. Un long week-end holistique au Pays Basque animé par la prof passionnée au mois de mai, où sororité, bienveillance et soin du corps règnent. Et surtout, un rendez-vous ouvert à toutes, pour favoriser l'équilibre hormonal et la fécondité.
Healthy Hormones, c'est une bulle où l'on s'échange des noms de spécialistes pendant qu'on concocte les petits plats imaginés par la naturopathe Lina Bou, cheffe du restaurant Providence Guéthary et autrice de Healthy & Happy Food, lors d'un atelier savoureux qui apprend à ajuster son alimentation "en fonction du moment du cycle, pour conserver l'énergie de la phase folliculaire et s'éviter l'émotivité, voire le syndrome prémenstruel et les douleurs de règles en seconde partie de cycle".
Puis, on passe à la découverte de la marque de cosmétique locale Alanea, mise au point par une dermatologue et sa fille, et élaborée sans perturbateur endocrinien ni reprotoxique (substance toxique pouvant altérer la fertilité). Un échange riche en informations sur les produits classiques que l'on utilise tous les jours, au cours duquel les fondatrices décryptent aussi comment améliorer notre routine.
Et puis, forcément, deux séances de Fertility Yoga, matin et soir, que Charlotte Muller aménage en fonction du cycle de chacune, mais aussi de leurs besoins et envies : apaiser des symptômes prémenstruels, concevoir un enfant, encourager les résultats d'une FIV, soulager les douleurs liées à l'endométriose. En bonus : massages et consultations de naturopathie sont possibles si souhaité.
Au-delà des bienfaits physiques, l'aspect psychologique a de quoi convaincre sérieusement. Durant ces quelques jours à Bidart, entre femmes, à pratiquer du yoga et manger des plats équilibrés, il y a de bonnes chances qu'on se sente entourée de personnes qui traversent la même chose que nous. Qu'on déconnecte, qu'on souffle et qu'on relâche enfin une pression qui nous épuise, en plus de jouer défavorablement sur notre organisme. Enfin.