Dès ce mois de novembre, pensez-y TRES fortement pour vos futurs cadeaux : "Les comédies romantiques" (aux éditions hoebeke) est clairement le livre à placer au pied du sapin. Dans cet opus grand format et cartonné, richement illustré, de près de 200 pages, l'autrice Marianne Lévy s'attarde sur des décennies de rom coms, de baisers sous la pluie et de regards de braise...
Et déploie des imaginaires qui ont su façonner notre culture populaire : s'y retrouvent d'iconiques profils féminins tels que Audrey Hepburn, Meg Ryan, Anne Hathaway, Diane Keaton, Melanie Griffith, Andie Macdowell, Renée Zelwegger, mais aussi, plus proches de nous, Sophie Marceau, Virginie Efira, Julie Delpy... Profils qui aujourd'hui encore obsèdent la génération TikTok.
Loin de se limiter à un best of cependant, ce livre très incarné est celui d'une cinéphile qui n'hésite pas à égratigner ses idoles. Cette somme de souvenirs émouvants - pour qui a déjà dégusté une romance sous un plaid, chocolat chaud à proximité - dénote par sa narration et ses réflexions rafraîchissantes et très bien vues. Loin de se suffire d'une nostalgie béate, cette rétrospective malicieuse chercher à interroger le genre... Et ses limites.
En bref c'est un régal. On vous détaille pourquoi.
Si vous vous êtes déjà retrouvé(e) à fondre à chaudes larmes à l'unisson de la protagoniste de "Nuits blanches à Seattle" - cette scène où Meg Ryan, en voiture, la nuit, s'écroule en écoutant à la radio le veuf Tom Hanks - alors pas de doute, vous comprenez le pouvoir non seulement lacrymal mais surtout ultra fédérateur des comédies romantiques, remèdes à notre mélancolie.
La rom com nous renvoie aux étoiles de l'âge d'or d'Hollywood - les Jean Arthur, Gene Tierney, Maureen O'Hara, Marilyn, Audrey Hepburn, Shirley Maclaine - tout comme à son évolution profonde dans les années 80 et 90 - qui verront éclore les Meg Ryan, Julia Roberts, Kathleen Turner, Andie Macdowell, Cameron Diaz, Sandra Bullock, Gwyneth Paltrow, Kate Beckinsale... Elle dit tout de l'usine à rêves : sa "chasteté" (face aux scènes de sexe) et son irrévérence trash (celle de la génération Kristen Wiig), son côté piquant (l'ère des Billy Wilder et Ernst Lubitsch) et son conservatisme affolant. Un cocktail de paradoxes !
Marianne Lévy le démontre en déployant sous la forme de chapitres envisagés comme les étapes d'une romance (premier date, baiser, rupture, happy ending) les mille tonalités d'un genre qui sacralise le couple (hétéro) ou le démolit, épice nos soirées d'instants hot tout en célébrant l'amour, le vrai, dépeint des personnages féminins très forts (working girls, célibataires, amoureuses volages) sans échapper aux pépites les plus sexistes...
Sus aux clichés et facilités ici : l'autrice esquive le piège du simple répertoire à beaux gosses que représente un tel projet éditorial (ils foisonnent pourtant : Richard Gere, Hugh Grant, Mark Ruffalo, Ryan Gosling, Patrick Dempsey, élu mec le plus beau du monde par People) et préfère s'en tenir à une ambition historique et militante : donner à voir les métamorphoses d'un genre à travers ses représentantes. Car cette histoire s'écrit au féminin.
Il sera ainsi question de grandes scénaristes américaines comme Nora Ephron (Quand Harry rencontre Sally, Vous avez un message) et Nancy Meyers (Ce que veulent les femmes, The Holiday) mais aussi de réalisatrices plus surprenantes comme la Française couronnée à Cannes Justine Triet (Victoria avec Virginie Efira), au point de vue dirons nous plus... Acidulé !
Et plutôt que d'un mash-up de scènes cultes, la volonté est d'effeuiller un imaginaire à travers ses détails : la symbolique de la danse dans ces films - aussi récurrente que le sexe ! - mais aussi de la mode, la manière dont certaines perles s'émancipent d'évidences (le rival masculin ou féminin).
Du plus petit morceau de cette culture, à la dimension la plus vaste : chaque focus permet ainsi d'aborder l'enjeu de tous ces films : dire plus ou moins directement la complexité et les contradictions de la condition féminine. Ambitieux. C'est aussi pour cela qu'on se reconnaît tant dans ces films : même les plus ratés déploient une pointe de justesse à ce sujet.
Entre les lignes, Marianne Lévy interroge enfin la présence toujours compliquée de la diversité dans ces productions plutôt très blanches et très hétéros, la façon dont les romances parlent AUSSI des hommes (revoir Sans Sarah Rien ne Va et son génial Jason Segel pour s'en convaincre) ou encore, la position actuelle de nos rom com chéries... A l'heure des applis de rencontres.
Il vous en faut encore ? Alors, foncez dans votre librairie. All you need is love.
"Les comédies romantiques" de Marianne Lévy, 190 p.
Aux éditions hoebeke, en librairies depuis le 12 octobre